Il est 9 h 30, ce vendredi 2 décembre, dans la tour B de Cœur Défense. En pénétrant dans l’espace Paris La Défense, à l’odeur du café et des viennoiseries, s’ajoute une drôle de symphonie : un mélange de français, anglais et néerlandais. Et pour cause : les représentants des quartiers d’affaires de Liverpool, Amsterdam, San Francisco, Dublin ou encore Montréal se sont réunis du 30 novembre au 2 décembre, à La Défense, à l’occasion du premier meeting du « Global Business Districts Innovation Club » post-pandémie.

Ce séjour fut l’occasion de visiter les dernières nouveautés du premier quartier d’affaires européen, comme la tour Hekla, mais surtout d’échanger sur une problématique commune : la mutation du monde du travail depuis la crise du Covid-19. « Combien de gens sont retournés au bureau depuis la pandémie ? Une grande partie, se satisfait Jorick Beijer, urbaniste et modérateur de la conférence du jour. Oui, il y a eu une grande vague de départ au début, mais on a constaté un retour de 80 % des salariés. Mais avec un rythme ­différent, pas cinq jours par semaine. »

Voilà l’enjeu principal pour tous les quartiers d’affaires concernés : convaincre les salariés de s’investir à plein temps sur leur lieu de travail, en leur proposant une expérience premium. « Les entreprises doivent changer la fonction des espaces de bureaux, souligne Richard Guiney, CEO de DublinTown BID en Irlande. On n’a pas forcément besoin d‘un bureau chacun, mais plutôt d’espaces de réunion. L’affectation de l’espace évolue, on vient au bureau pour une expérience. Si on veut simplement faire son travail, on peut le faire de chez soi. »

Les tours mixtes semblent en effet séduire de plus en plus d’entreprises, mais la mixité ne s’arrête pas aux bâtiments et à leurs espaces, comme le prouve l’évolution du quartier de East Cut, à San Francisco, représenté par son directeur exécutif Andrew Robinson. « Nous essayons de briser les barrières entre quartier d’affaires et quartier résidentiel, affirme-t-il. Tout n’est pas rose, mais nous avons remarqué quelques évolutions du quartier, avec de nombreux loisirs et services. Nos parkings accueillent désormais plus de monde le week-end que la semaine. »

La pandémie semble donc avoir sonné le glas des quartiers monofonctionnels, pour aller vers une diversification qui semble séduire salariés et riverains. C’est notamment le cas dans le quartier Zuidas, à Amsterdam, comme le souligne Paco Bunnik, architecte et urbaniste à la municipalité d’Amsterdam. « Nous essayons de diversifier notre quartier, qui a été mis en place dans les années 1990. Nous ­souhaitons créer un écosystème, une zone incluant la nature et résistante au réchauffement climatique. On souhaite également améliorer l’aspect social du quartier : notre projet sur 10 ans est d’arriver à 40 % de logements sociaux et 40 % de locaux d’affaires dans le quartier. Depuis, l’énergie a changé, cela crée une synergie avec plus d’espaces culturels par exemple, qui remplacent les salles de sport et les bars qui étaient omniprésents. »

Cette rencontre fut également l’occasion pour Pierre-Yves Guice, directeur général de Paris La Défense, de rappeler les axes stratégiques de l’établissement public gestionnaire du quartier d’affaires. « Nous avons pris la décision de réduire les émissions de gaz à effet de serre du quartier à la fin de la crise sanitaire, rappelle-t-il. Leurs effets se faisaient de plus en plus forts, rendant le quartier moins agréable et attractif. Nous souhaitons également rétablir la promesse d’innovation du quartier qui s’est perdue dans le temps, et redevenir des pionniers dans l’architecture. Enfin, notre nouveau mode d’action est également de recréer une communauté d’acteurs de La Défense autour d’enjeux comme ­l’environnement et l’insertion sociale. »