Au départ, il s’agissait d’un blocus pacifique organisé par les élèves du lycée polyvalent Joliot-Curie, à Nanterre. Si cet établissement est depuis plusieurs semaines au cœur de l’actualité, c’est parce qu’il est l’ancien lycée de Kai Terada, professeur syndiqué dont la mutation imposée a fait grand bruit. Cependant, lundi 10 octobre, les élèves responsables du blocus réclamaient surtout un retour de l’aide au devoir, en partie supprimée cette année. Une requête soutenue par la Mairie, qui publiait le 12 octobre un communiqué de presse dans lequel le maire Patrick Jarry (DVG), « demande à l’Éducation nationale d’entendre la revendication d’une véritable aide aux devoirs des jeunes ».

Ce mercredi-là, déjà, des heurts avaient éclaté devant l’établissement. La Municipalité assurait que la prise en compte de cette demande permettrait « de ramener un climat de sérénité ». Sur Twitter, le personnel du lycée a publié un communiqué au lendemain de la journée de blocus durant laquelle 10 lycéens ont été arrêtés. Ils affirment une mauvaise gestion de la situation : « Il a fallu attendre trois heures pour que la décision de fermer l’établissement soit prise » et montre du doigt une « présence policière de plus en plus massive » qui a, selon eux, contribué à tendre la situation. Un déploiement policier jugé « disproportionné » et non adapté « à une manifestation pacifique de jeunes très majoritairement mineur·e·s ».

En effet, la semaine dernière, ce sont 16 élèves, en tout, qui ont été interpellés, dont 14 mineurs. Un appel aux manifestations devant l’établissement, mais aussi devant le commissariat de Nanterre, a été lancé sur les réseaux. Le slogan « Libérez nos enfants » y était scandé par des parents en colère. Pendant ce temps-là, certains médias affirment que les élèves manifestent pour pouvoir porter « des vêtements islamiques ». Si certains élèves ont dénoncé des « contrôles vestimentaires » pratiqués à l’entrée, « l’organisation pacifique lycéenne » a tenu à remettre les choses au clair dans un communiqué publié le mardi 11 octobre. « Certains médias démunis de toute honnêteté ont entrepris d’assimiler ces propos à des causes que le mouvement n’a jamais évoquées. Les revendications se limitent à la reprise de l’aide aux devoirs au sein de l’établissement. Ce mouvement avait aussi pour optique de témoigner un soutien au professeur Kai Terada. »

Ce lundi 17 octobre,devant le lycée polyvalent Joliot-Curie, les forces de l’ordre étaient encore présents en nombre.

Plutôt que de contrôles vestimentaires, Jean-Pierre Bellier, adjoint au maire chargé de l’action éducative parle à nos confrères du Monde de « maladresses de personnel ». Selon lui, « la plupart des élèves ne discutent pas le fait de devoir enlever le voile quand elles entrent au lycée ». Dans leur communiqué, les élèves du lycée Joliot-Curie rappellent avoir voulu manifester de manière pacifique. Selon eux, l’offensive vient d’en face. « Aux alentours de 10 h 30, les agents de police décidèrent de charger violemment les lycéens. » Les choses ont dégénéré et un élève aurait été hospitalisé « après avoir reçu un tir de LBD sur l’arrière du crâne ». Une information qui n’a pas été confirmée.

En attendant, depuis cette journée de blocus, la tension était palpable aux alentours du lycée Joliot-Curie de Nanterre. Jeudi 13 octobre, de nouvelles échauffourées ont éclaté vers 8 h 30 et le lycée a dû fermer ses portes. « Une cinquantaine d’individus, le visage dissimulé, se sont regroupés devant le lycée pour empêcher l’accès aux élèves », a raconté la préfecture dans un communiqué. Des passants et des policiers ont reçu des jets de pierres. C’est le jour qu’a choisi l’académie de Versailles pour annoncer la remise en place de l’aide aux devoirs, rapporte Le Monde. Malgré cela et l’appel au calme lancé par Pap Ndiaye, le ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse, dimanche au micro de RTL, ce lundi 17 octobre… rebelote. De nouveaux tirs de mortiers d’artifices ont résonné dans le quartier. Des jeunes cagoulés ont visé les policiers, encore présents en nombre devant l’établissement. Cinq mineurs ont été interpellés et placés en garde à vue, mais le calme est revenu rapidement et les cours ont pu être maintenus.

Les aides aux devoirs devraient reprendre après les vacances, non plus assurés par un élève de polytechnique, comme c’était le cas depuis le début de l’année, mais avec deux assistants pédagogiques qui assureront une permanence de l’aide aux devoirs quotidienne, dès 11 h 30. Selon Le Parisien, trois mineurs au moins seront convoqués en décembre devant le tribunal pour enfants, « pour violences aggravées sur personne dépositaire de l’autorité publique et avec arme ». Quant au combat de Kai Terada, il continue. L’enseignant a formé un recours contre sa mutation « forcée » et une audience devait avoir lieu ce lundi.