Pour comprendre la décision de la Cour de Cassation, de réexaminer l’annulation d’une procédure vieille de vingt ans, il faut évidemment remonter dans le temps. Le lundi 11 janvier 2020 s’ouvrait le procès de « l’affaire de la chaufferie de La Défense ». Un « fiasco judiciaire » selon Le Monde, qui concerne une affaire de corruption présumée survenue en 1998. À l’époque, un appel d’offres est lancé pour choisir la société qui exploitera le chauffage urbain et la climatisation du quartier d’affaires. C’était alors Climadef (filiale de Charbonnages de France) qui gérait la chaufferie de la Défense, et ce depuis 1968. Celui qui lance cet appel d’offre n’est autre que Charles Ceccaldi-Raynaud, président du Syndicat intercommunal du chauffage urbain à La Défense (Sicudef), mais aussi sénateur et maire de Puteaux.

Le marché, qui vaut des centaines de millions d’euros, est attribué au bout de six mois au groupement d’entreprises Enerpart-Vatech-Soffimat, connu sous le nom d’Enertherm. Seulement voilà, Charles Ceccaldi-Raynaud est soupçonné d’avoir touché des pots-de-vins de cinq personnages, à hauteur de cinq millions d’anciens francs (soit 770 000 euros), pour favoriser l’entreprise. Entre 2002 et 2019, six juges d’instruction se succèdent sur l’affaire. Mais il faut attendre 2007 pour que Charles Ceccaldi-Raynaud soit mis en examen pour « corruption passive » et « favoritisme », rappelle Le Monde. Le sénateur nie alors les faits, mais montre du doigt sa propre fille, Joëlle Ceccaldi-Raynau, actuelle maire de Puteaux. Face à l’existence dévoilée d’un compte en banque luxembourgeois, et de transferts douteux d’argent, père et fille se renvoient la balle des responsabilités.

En novembre 2015, la maire de Puteaux reconnaît devant un juge d’instruction l’existence de ce compte occulte et le mouvement de grosses sommes d’argent. Une nouvelle enquête commence et Joëlle Ceccaldi-Raynaud est mise en examen, en 2020, pour « blanchiment de fraude fiscale aggravée ». Parmi les prévenus du procès de janvier 2021, Jean Bonnefont, ex-dirigeant de Charbonnages de France, alors âgé de 98 ans. Mais aussi Bernard Forterre, ancien membre de la Compagnie générale des Eaux-Vivendi, âgé de 82 ans. Le principal accusé, Charles Ceccaldi-Raynaud, est décédé en 2019. Face au temps écoulé entre l’affaire et le procès, le tribunal de Nanterre décide, en 2021, d’annuler l’intégralité de la procédure. On juge alors qu’un « procès ­équitable » n’est plus possible.

L’histoire pourrait s’arrêter là… Sauf qu’arrive un rebondissement ! Le parquet général a saisi la Cour de cassation d’un pourvoi. Cette dernière a décidé, le 22 septembre dernier, de rouvrir ce dossier complexe. Objectif : réexaminer l’annulation de la procédure, pour s’assurer de sa validité juridique. La Cour de cassation rendra sa décision le 9 novembre, annonce Le Parisien.