Ce week-end, a eu lieu le premier tour des élections départementales dans les Hauts-de-Seine qui aurait dû se tenir en mars 2021. L’occasion pour les altoséquanais de choisir leurs prochains conseillers départementaux. Durant ce premier tour, la majorité départementale a su renforcer ses positions en conservant l’avantage dans de très nombreux cantons avant la tenue du second tour (un seul canton n’aura pas de second tour, celui de Neuilly-sur-Seine, où la droite a déjà été élue, Ndlr). Si de nombreux candidats ont fait des scores importants, l’abstention ne leur a pas permis de se qualifier dès le premier tour.

Dans les Hauts-de-Seine, trois cantons permettent de reconstituer le quartier d’affaires de la Défense, celui de Courbevoie-2, réunissant Puteaux et une partie de la ville de Courbevoie et les deux cantons de Nanterre, l’un associé à Suresnes, l’autre à Asnières-sur-Seine.

Comme au niveau régional (voir notre article), la droite a su tirer son épingle du jeu malgré l’abstention, la gauche et les écologistes n’ayant pas réussi à trouver de compromis pour créer des binômes unis face aux forces en présence. Georges Siffredi actuel président du Département semble ainsi déjà avoir ses chances pour poursuivre son programme sur le territoire. Sur le canton Nanterre-1, Patrick Jarry (DVG), conseiller départemental sortant offre tout de même à la gauche une chance supplémentaire de siéger au conseil départemental.

Effectivement, avec un double scrutin repoussé de mars à juin à cause de la situation sanitaire, les bureaux de vote n’ont pas été pris d’assaut dimanche 20 juin.

L’élection aura été fortement marquée par l’abstention des électeurs. Si elle est moins élevée dans les Hauts-de-Seine qu’au niveau national, cela démontre une réticence à voter de la part des électeurs, selon certains candidats à cause de la crise sanitaire, du report de l’élection, pour d’autres à cause d’un manque d’information lié à cette double élection, ou encore par méfiance envers les candidats. Le deuxième tour approchant, le mot d’ordre des candidats reste la mobilisation.

Les élections départementales ont normalement lieu tous les six ans, au mois de mars. Un calendrier électoral totalement chamboulé par la crise sanitaire qui frappe le pays. Après le report du deuxième tour des élections municipales en 2020, le gouvernement avait donc décidé de reporter les élections de mars au moins de juin, en attendant que la situation se stabilise.

Après une courte campagne elle aussi chamboulée dans ses codes par la crise sanitaire, les résultats sont tombés pour les cantons des Hauts-de-Seine dimanche soir. Sur le canton de Courbevoie-2, reliant Puteaux et la partie ouest de Courbevoie, la majorité départementale est arrivée en tête de ce premier tour. Marie-Pierre Limoge (UDI), adjointe à la mairie de Courbevoie et conseillère départementale sortante pour le canton Courbevoie-1 et Vincent Franchi (LR), adjoint au maire de Puteaux ont récolté 43,7 % des votes. Derrière eux, le binôme Lrem de Christophe Hautbourg, conseiller municipal d’opposition à Puteaux et Élodie Lacassagne avec 18,5 % des voix.

Le binôme de la majorité présidentielle est suivi de près par la liste EELV de Dan Zisso et Priscille Descolas avec 18,3 % des voix. Le Rassemblement National représenté par Jean-Pierre Chabrut et Joëlle Dubois dépasse légèrement le binôme du Parti socialiste constitué d’Alban Thomas et Nadine Jeanne.

Le lendemain, les deux binômes qualifiés pour le second tour se réjouissaient de tels résultats. Pour Marie-Pierre Limoge, conseillère départementale sortante « C’est une très bonne nouvelle. On est largement en tête malgré une participation qui est quand même très faible, même si elle n’est pas si faible que ça sur le canton, elle reste très faible, donc on est très content de ce score. Il faut concrétiser ».

De son côté, Christophe Hautbourg, déclare : « Nous on est satisfait de cette seconde place qui nous positionne en ballotage face aux deux conseillers départementaux sortants, donc voilà on remercie les électeurs pour la confiance qu’ils nous ont accordée sur ce premier tour et puis ça nous encourage à poursuivre vers le chemin de la victoire au second tour ».

Pour les trois autres binômes le réveil aura sûrement été moins joyeux, mais chacun se félicite malgré l’abstention de ces scores. « C’est une très jolie surprise, pleine d’espoir pour la suite, et ça donne un nouveau souffle », réagit Priscille Descolas. Pour Alban Thomas, ancien conseiller municipal d’opposition de Courbevoie, arrivé avec son binôme cinquième du canton, les raisons de se réjouir sont tout de même présentes notamment grâce à une belle « campagne de terrain » qui a porté ses fruits. « On est quand même premier sur un des bureaux, c’est symbolique, mais c’est fort », analyse-t-il.

Dans le canton Nanterre-2, qui regroupe une partie de Nanterre et la ville de Suresnes, sept binômes étaient sur la ligne de départ dimanche matin. C’est finalement le binôme de l’union de la droite de Camille Bedin et Guillaume Boudy qui a pris la tête (41,98%), suivi par celui Lrem de Mélanie Blanchetot et Pascal Gentil (17,06%).

Trois binômes dépassent les 10 %, ceux de l’union de la gauche, Nesrine Rezzag-Bara et Jérôme Pellerin, des écologistes Lise Cortès et Jacques Moulin ainsi que celui du RN de Dominique Bourdoulous et Laurent Salles. Derrière, les deux derniers binômes sont ceux des candidats d’extrême gauche Céline Auges et Bronislaw Slupek, et des candidats divers gauche Anne-­Denise Brochot et Valéry Barny.

Malgré une troisième place, une fois les résultats des deux villes associés, Nesrine Rezzag-Bara se réjouit d’avoir été en tête dans les bureaux de vote nanterriens devant Camille Bedin : « C’est une super satisfaction. La gauche à Nanterre est là, un an après les municipales ». Une satisfaction également pour Lise Cortès et Jacques Moulin, candidats pour la première fois aux départementales. « En ce qui me concerne, j’étais très satisfaite du résultat. 11,5 % c’est un très bon résultat ».

Dans le canton Nanterre-1, divisé entre Nanterre et Asnières-sur-Seine le maire Patrick Jarry (DVG), conseiller départemental sortant, en binôme depuis 2015 avec Laureen Genthon a une nouvelle fois prouvé la fidélité de ses électeurs. Le binôme est arrivé largement en tête avec 41,46 % des voix, devant le binôme Divers droite de Marie-Hélène Decis-Lartigau et Christophe Ribault (15,32%).

Deux binômes dépassent également les 10 % lors du premier tour, un binôme d’union de la gauche et des écologistes menés par Emmanuelle Fossati et ­Olivier Rassemusse (14,21%) et celui du Rassemblement National d’Alain Chialvo et d’Anne Sild avec 11,18 % des voix. Derrière, sous la barre des 10 %, le binôme constitué des conseillers municipaux du groupe d’opposition Aimer Nanterre Alexandre Guillemaud et Samia Boussissi-Poullard, celui de la France Insoumise de Julie Barbaux et Cédric Briolais et enfin un dernier binôme d’extrême gauche constitué de José Eloundoou et Valérie Saint-Edward.

Pour les candidats non qualifiés au second tour sur le canton, les résultats sont tout de même un signe encourageant pour l’avenir. « Nous prenons acte des résultats et du choix des Nanterriens qui se sont exprimés aujourd’hui, réagit Alexandre Guillemaud le soir même du premier tour. Ce score est le premier résultat obtenu par le parti d’alternative municipal, Aimer Nanterre, quelques mois après sa création, c’est une première étape que nous allons continuer en travaillant pour les Nanterriens en tant qu’élus municipaux ».

Une joie partagée par le binôme arrivé troisième sur le canton. « Avec Olivier et toute notre équipe, on est très contents de notre résultat, raconte Emmanuelle Fossati le lendemain du scrutin. C’est paradoxal, car on n’est pas au second tour. Mais nous étions de parfaits inconnus, on n’avait pas de mandat municipal, nous étions les seuls, on n’a pas eu  beaucoup d’échos médiatiques. Donc on est très contents d’être à 90 voix du second tour ». 

Pour la candidate Laureen Genthon, arrivée en tête avec Patrick Jarry, les résultats satisfaisants pour eux sont tout de même inquiétants : « On est content du résultat, mais je suis très préoccupée par le taux d’abstention qui est extrêmement fort ».

Sur le canton de Courbevoie-2, reliant Puteaux et la partie ouest de Courbevoie, la majorité départementale est arrivée en tête de ce premier tour.

Effectivement, avec un double scrutin repoussé de mars à juin à cause de la situation sanitaire, les bureaux de vote n’ont pas été pris d’assaut dimanche 20 juin (voir notre article page 4). Au niveau national, le ministère de l’Intérieur a indiqué que l’abstention représentait 66,74 % des personnes inscrites sur les listes.

Un chiffre historique, légèrement moins important dans le département des Hauts-de-Seine où l’abstention représente 64,62 % des inscrits. Pour Nanterre-1, l’abstention a atteint selon le site internet du ministère de l’Intérieur 73,56 %, pour Nanterre-2, 69,71 % et sur le canton de Courbevoie-2, 55,56 %.

« Même si nous on est un peu au-dessus de la moyenne nationale dans les Hauts-de-Seine, ça reste des taux d’abstention record », réagit Christophe Hautbourg, candidat pour le canton Courbevoie-2 avec Élodie Laccassagne. « Nous regrettons tout d’abord la forte abstention se montrant dans notre ville à 78 %, c’est un mauvais signe pour notre démocratie », s’inquiète Alexandre Guillemaud (Union du centre, président du groupe d’opposition municipal Aimer Nanterre) le soir de l’élection.

Des raisons d’une telle abstention, les candidats se rejoignent pour la plupart. « Cela est dû principalement aux deux élections mélangées et au choix de la date qui vient en sortie de confinement et à quelques jours des vacances d’été, les Nanterriens n’avaient donc pas en tête de choisir leurs élus départementaux (élus souvent méconnus) », explique Alexandre ­Guillemaud. « Les campagnes se sont déroulées sur fond de crise sanitaire et de gestes barrières, les dates ont été reculées le plus tard possible pour faire en sorte que les gens ne soient pas là, réagit Marie-Pierre Limoge. Il y a un contexte totalement défavorable à la participation ».

Pour la conseillère municipale Laureen Genthon (DVG) : « Il y a aussi une abstention qui est fortement liée à une méfiance, à une perte de confiance dans nos institutions qui est quand même manifeste ». Un sentiment ressenti également à plusieurs niveaux par Christophe ­Hautbourg : « On a entendu aussi le mécontentement des électeurs par ce vote, une abstention extrêmement forte qui finalement, je ne sais pas si c’est un vote de défiance, mais en tout cas, c’est un vote de résignation quelque part de se dire, « on ne peut rien changer c’est toujours les mêmes, toujours les mêmes pièces, toujours les mêmes acteurs » ».

Un manque d’information et de communication autour des deux élections organisées simultanément serait aussi responsable d’un tel taux d’abstention. « La plupart des personnes à qui ont a pu parler dans la rue ne ­savait même pas qu’il y avait deux scrutins simultanément », regrette Dan Zisso, candidat pour le canton Courbevoie-2 pour Europe Ecologie les Verts (EELV).

« C’est que les gens n’ont pas forcément bien perçu que l’élection départementale, notamment elle, est essentielle pour la qualité de vie, le bien-être au quotidien de tous nos habitants et c’est peut-être ça l’enjeu justement », insiste ­Marie-Pierre Limoge.

Les candidats qui seront présents au second tour, sont unanimes pour dire qu’il faut désormais en quelques jours seulement réussir à faire venir les abstentionnistes jusqu’aux urnes dimanche 27 juin. « Je vais tout faire pour qu’au second tour, il y ait plus de participation », précise ainsi Laureen Genthon. « C’est vraiment mobiliser pour le vote l’enjeu, au-delà même de nous, c’est un enjeu démocratique » martèle Marie-Pierre Limoge.

Un enjeu était également présent dans certains cantons. Celui de réussir à réunir les listes de gauche et d’EELV pour créer une liste capable d’affronter les candidats sortants de la majorité départementale en place. Un rendez-vous manqué sur les cantons de Courbevoie-2 et Nanterre-2. Alban Thomas du canton Courbevoie-2 raconte ainsi : « Le constat qu’on en fait c’est que la gauche et les écologistes vont redisparaître du deuxième tour, car ils sont désunis et nous à Courbevoie c’est la deuxième fois », rappelant le schéma des élections municipales (voir notre édition du mercredi 17 mars 2020).

« C’était écrit d’avance que si on n’était pas regroupé on allait être évincé du deuxième tour, précise Alban Thomas. Pendant six mois, j’ai tenté de discuter avec EELV, on s’y est mis en octobre parce qu’on pensait que les élections seraient en mars au départ. On a eu l’impression de parler tout seul, mais il n’y a pas que nous d’autres petits partis de gauche, Génération.s voilà, on a eu un mur ».

Un choix assumé du côté des candidats d’Europe Ecologie les Verts du même canton. « Il y a eu des discussions, qui ne nous ont pas amené à la présentation d’un binôme uni, indique Matthias Parveau, correspondant EELV Courbevoie, poursuivant sur le nouveau paysage politique ne permettant pas d’anticiper les résultats des élections. Ça ne nous a pas permis forcément d’avoir des discussions qui étaient conclusives. Après nous, on a fait un choix, celui de présenter un binôme qui était effectivement centré sur l’écologie, sur la proposition de l’écologie politique, le résultat est le résultat ».

Les écologistes et représentants du parti de Benoît Hamon Génération(s) n’ont pas réussi à se mettre d’accord avec la liste d’union de la gauche pour le canton Nanterre-2. Lise Cortès de déclarer : « Nous avons dit que nous partions avec ceux qui ­voulaient partir avec nous en tête d’une liste EELV. Génération(s) nous a ­rejoint. On n’a pas eu de propositions d’autres partis. [Madame Rezzag] ne nous a rien proposé ».

Écho différent du côté de Nesrine Rezzag-Bara qui indique qu’un travail avait été fait en amont avec tous les partis de la gauche et la municipalité pour créer une coalition et des listes fortes. « Nous avons proposé le rassemblement à EELV dès le premier tour, qui n’a pas souhaité le faire pour des raisons de comptage, ils souhaitaient se compter », indique la candidate. Des propositions de rassemblement avec la France Insoumise auraient également été formulées sur les deux cantons de Nanterre, sans succès.

La campagne pour le second tour sera une course contre la montre pour tous les candidats. Quelques jours seulement séparent les deux tours. À Courbevoie, Marie-Pierre Limoge croit en une victoire lors du deuxième tour grâce à ces premiers résultats encourageants : « Il faut qu’on concrétise cette victoire sur une belle victoire de deuxième tour » rappelant l’importance de la mobilisation, « il y a un vrai défi à mobiliser pour le vote et à remobiliser notre électorat aussi ».

Christophe Hautbourg qui affrontera les conseillers sortants indique de son côté : « On est ­entrain de construire notre stratégie et la manière dont on va déployer tout ça, c’est sur que ça va être très court ». Selon le conseiller municipal de Puteaux : « Ça donne un élément aussi positif pour nous pour le second tour parce que notre objectif est très clairement de rassembler autour de notre candidature, rassembler l’ensemble des électeurs quelque soit leur appartenance de base mais d’aller au-delà des clivages politiques […] du coup si on y arrive, on a clairement une réserve de voix assez importante dernière nous, ce qui n’est pas le cas d’LR parce qu’eux pour le coup ont réussi à mobiliser leur électorat dès le premier tour ».

Pour Laureen Genthon l’objectif sera également de « mobiliser » les Nanterriens pour retrouver « une affluence dans les bureaux de vote », estimant que les électeurs de gauche doivent se battre « pour contrer cette droite qui fait vraiment beaucoup de mal pour les Nanterriens et Nanterriennes ».

Des candidats ne s’étant pas qualifiés pour le deuxième tour ont d’ores et déjà apporté leur soutien à l’un ou l’autre binôme du canton. Emmanuelle Fossati, candidate de l’union de la gauche et des écologistes pour le canton Nanterre-1 déclare ainsi lundi 21 juin, lendemain des résultats : « Bien entendu, on est un canton historiquement de gauche, et il est hors de question que nous ayons une quelconque responsabilité si ça passe à droite. On a tout de suite apporté notre soutien à Patrick et Laureen, on l’a fait officiellement […] On va appeler à faire barrage contre la droite sur le canton de Nanterre. »

CRÉDIT PHOTO : LA GAZETTE DE LA DÉFENSE