Un quinquagénaire comparaissait libre devant le Tribunal de grande instance (TGI) de Nanterre, mercredi 14 octobre. Récidiviste, il était accusé de menaces de mort et de violences envers deux ouvriers d’un chantier à Boulogne-Billancourt. Mais, plus que cette altercation survenue au début du mois de décembre 2019, c’est une rixe qui a retenu l’attention du tribunal lors de l’audience.

En effet, l’homme de 53 ans était aussi jugé pour avoir proféré des menaces de mort et insulté un policier Nanterrien, alors qu’il se rendait au commissariat dans le cadre de son contrôle judiciaire, en juin dernier. Multirécidiviste concernant les outrages en tout genre à l’encontre de personnes dépositaires de l’autorité publique, il a, durant l’audience, levé le voile sur une partie traumatisante de sa vie.

« On voit que vous n’aimez pas beaucoup les policiers », ironise la présidente de séance à la lecture du casier judiciaire du prévenu. En effet, l’homme à la barre a été condamné de très nombreuses fois pour des outrages, des violences ou des menaces de mort envers des policiers. Alors, l’homme déjà à la barre depuis près d’une heure, commence à se confier sur son enfance.

Placé dès ses quatre ans avec son frère jumeau et leur autre frère, il explique avoir rejoint rapidement une famille d’accueil. Là, il se retrouve dans une famille dont le père est policier. « Avec son fils, il m’a battu et humilié, se rappelle le prévenu à la voix brisée par l’émotion. J’ai fini par m’enfuir à 17 ans et demi. »

« Ces personnes là elles n’ont jamais été condamnées », regrette-t-il encore alors qu’il évoque son parcours, de son bac littéraire à ses récents petits boulots pour des chantiers en passant par sa maîtrise aux beaux arts et sa carrière de champion de boxe. Le silence se fait dans la salle d’audience, mais si sa réaction peut expliquer son geste, il ne l’excuse pas pour le tribunal.

La présidente rappelle les faits de juin dernier, alors que l’homme est sous le coup d’un contrôle judiciaire. Habitant Nanterre, il se rend au commissariat de la ville pour se soumettre à ses obligations. « J’étais de garde statique », témoigne de son côté le policier de garde devant le bâtiment, interrogé à la suite de l’agression.

« Il a dit qu’il avait été plutôt aimable avec vous et qu’il vous avait même prêté un stylo », constate la présidente à la lecture de la déposition. Le prévenu à la barre nie, et explique avoir toujours un stylo sur lui. Il assure par contre être très régulièrement humilié par ce policier, alors qu’il vient pointer au commissariat depuis plusieurs mois.

« Je déteste qu’on m’insulte par rapport à mon handicap, s’insurge le prévenu, victime de strabisme. Ce n’est pas la première fois que ce policier me manque de respect. » Pourtant dans la procédure, rien ne vient corroborer ses dires. Par contre, les insultes violentes, proférées contre le policier sont rappelées et ne jouent pas en la faveur du quinquagénaire.

« Vous ne vous rendez pas compte que vous auriez besoin de soins psychologiques », lui intime la présidente de séance au regard des deux examens psychologiques qu’il a subi avant son audience. « J’aurais besoin de vider mon sac », concède-t-il tout en faisant montre de réticences à ce sujet. Car dans les deux affaires, les premières insultes et violences envers les ouvriers de chantier puis l’outrage contre le policier, c’est bien un problème de gestion de la violence qui est évoqué.

« Vous êtes extrêmement vif, constate par exemple le procureur. On n’a pas de mal à croire que des personnes aient pu porter plainte ». À la suite d’une courte prise de parole, il requiert une peine de six mois de sursis probatoire de deux ans en plus d’une obligation de soins psychologiques. L’avocate du prévenu, quant à elle, assure que les deux affaires n’ont pas fait l’objet d’enquêtes approfondies : « On a affaire à une parole contre une autre ».

« Il est agressif, concède-t-elle. Mais, je ne pense pas que le passage à l’acte soit dans sa nature ». Revenant longuement sur ses problèmes de gestion de la colère, elle demande finalement la relaxe de son client pour les deux affaires. Mais, à l’issue de la suspension d’audience, l’homme est finalement condamné.

« Le tribunal pense que vous avez bien agressé ces personnes, tranche la présidente de séance. Mais, on met ces faits sur le compte de votre tempérament. » Le quinquagénaire est finalement condamné à quatre mois de prison avec sursis et une obligation de soins psychologiques. 

RAPPEL
Les condamnations en première instance ne sont pas définitives puisque susceptibles d’appel. Jusqu’à leur condamnation définitive, les prévenus sont donc toujours présumés innocents.

PHOTO : ILLUSTRATION / LA GAZETTE DE LA DEFENSE