Grosses tensions au Tribunal de grande instance (TGI) de Nanterre mercredi 20 novembre en début d’après-midi après le rendu du verdict condamnant un jeune homme à de la prison avec sursis suite à la très violente agression d’un autre jeune. La famille de la victime quitte la salle, mais son frère fait irruption et profère des menaces contre le prévenu, toujours assis dans la salle.

Quatre policiers ont dû intervenir pour faire évacuer la famille de la victime et le commissariat de Nanterre a immédiatement été prévenu. Tout au long de l’audience, le frère avait eu énormément de mal à garder son calme face à une présidente de séance aux questions sans détour. Elle l’avait d’ailleurs houspillé à cause de son attitude à plusieurs reprises.

« Qu’est-ce qu’il a dit ? », s’alarme la présidente de séance après que le frère de la victime de l’audience précédente a fait irruption dans la salle pour menacer le prévenu en arabe. L’avocate de la défense, elle, arrive paniquée, « on ne va pas passer Noël, lâche-t-elle à la procureure. Ils nous ont tous menacé de mort ».

Alors que l’audience suivante a commencé, la magistrate décide de la suspendre. La procureure est chargée d’alerter le commissariat de Nanterre, où la famille du prévenu devrait aller porter plainte. Dans le même temps, quatre policiers évacuent la famille de la victime hors du bâtiment. Cette dernière altercation marque ainsi la fin d’un début d’après-midi particulièrement mouvementé au TGI de Nanterre.

L’affaire est, en effet, particulièrement épineuse. Un jeune prévenu fait face au tribunal. Le 12 juillet dernier, il a roué de coups le jeune homme assis à quelques mètres de lui, le tout avec son frère mineur. Les deux agresseurs le laissent pour mort dans leur cage d’escalier. Finalement, la victime se réveille après plusieurs jours de coma et passe plusieurs mois à l’hôpital avant d’en sortir en septembre.

Dès le début de l’audience, la présidente s’évertue à remonter à la source de cet épisode extrêmement violent. Plusieurs semaines avant, les routes des deux jeunes hommes habitants de la cité Fernand Léger se croisent lors d’un accident de scooter. Le choc est violent, « la roue arrière de son engin est rentrée dans le moteur », illustre l’avocate de la défense. Mais lorsque le prévenu propose de faire un constat, la victime qui n’est pas assurée refuse et part.

Les choses auraient pu en rester là sauf que la victime de l’affaire jugée mercredi dernier contacte le prévenu via le réseau social Snapchat. Là et jusqu’au jour de l’agression, il demande de fortes sommes d’argent au jeune homme. « Je vais baiser ta mère, je vais t’enculer, je vais mettre une balle dans la tête de ton père : c’est ça qu’il lui disait tous les jours », dénonce l’avocate de la défense.

Issu d’une famille sans le sou, le jeune prévenu se retrouve démuni. Il tente de gagner du temps, mais n’alerte pas la police. « Vous auriez dû », lui intime la présidente. Finalement, le 12 juillet dernier, la victime se présente au domicile du prévenu, qui vit avec sa famille. C’est le père qui ouvre la porte. En découvrant le harceleur de son fils, il lui met une gifle.

« La gifle vous la méritiez monsieur », lui fait remarquer la présidente de séance. La remarque excède d’ailleurs le frère de la victime, assis au premier rang, qui se prend la tête dans les mains. Après cette première gifle, le prévenu et son frère se jettent sur le jeune homme à la porte et le rouent de coups. La présidente dévoile les photos de la cage d’escalier ensanglantée après les violences : « C’est une vraie scène de crime. Et vous vous êtes enfui en le laissant pour mort ».

Le jeune homme à la barre reconnaît les faits comme il l’a toujours fait depuis le début de l’affaire. Il s’est même rendu au commissariat avec son frère quelques heures après l’agression. « Avec toutes les menaces, j’ai cru qu’il allait tuer mon père », explique-t-il. La victime est quant à elle transportée à l’hôpital en urgence absolue et ne se réveillera que quelques jours plus tard.

« Vous avez l’air d’oublier que c’est lui la victime. Et lui seul », s’emporte l’avocate des parties civiles à l’intention de la présidente de séance qui n’a pas été tendre avec lui comme avec le prévenu. « Son jeune frère reçoit encore des menaces, lui fait savoir l’avocate de la partie adverse en évoquant la famille du prévenu. Et ce n’est pas d’il y a un mois, c’était cette semaine. »

Finalement, le prévenu est condamné à 10 mois de prison avec sursis. Employé comme contractuel dans une municipalité des Yvelines, une inscription sur son casier judiciaire jusqu’ici vierge aurait mis à mal son avenir professionnel. Sa condamnation ne sera donc pas inscrite. En outre, la présidente de séance avoue que dans le verdict, « les torts seront partagés ».

À en croire la réaction du frère de la victime à ces mots, c’est certainement ce verdict qui l’a mené à menacer le prévenu après l’audience. Pourtant, le jeune homme, pleinement conscient de ce qu’il avait risqué, faisait profil bas et attendait que les parties civiles aient quitté les lieux avant de lui-même s’en aller.

Ses parents, présents à ses côtés avec quelques amis, se sont vu conseiller de porter plainte auprès du commissariat de Nanterre. Bien que le verdict ait été donné, l’affaire n’est donc certainement pas finie : si elle a eu lieu, cette nouvelle plainte pourrait elle aussi être jugée. En plus, le frère mineur du prévenu, qui a lui aussi reconnu les violences, devrait prochainement être jugé par le tribunal pour enfants.

RAPPEL
Les condamnations en première instance ne sont pas définitives puisque susceptibles d’appel. Jusqu’à leur condamnation définitive, les prévenus sont donc toujours présumés innocents.

PHOTO : ILLUSTRATION / LA GAZETTE DE LA DEFENSE