Un homme accusé d’agression sexuelle sur une jeune femme dans le Tram 2 à la Défense a été condamné à 18 mois de prison ferme, mardi 4 février au tribunal de Nanterre. Le 19 octobre dernier, la victime avait subi une agression particulièrement choquante en pleine heure de pointe, dans le tramway qui dessert le quartier d’affaires. Aucun passager n’avait réagi pour lui venir en aide.

Ce matin-là, elle se rendait à son travail depuis Colombes, où elle réside. Alors qu’elle était dans le tramway, elle a remarqué que l’homme derrière elle avait sorti son sexe de son pantalon et se masturbait contre elle. Malgré ses cris, personne dans le wagon bondé ne lui est venu en aide. Elle a finalement été épaulée par son patron, une fois arrivée sur son lieu de travail.

« J’ai senti quelque chose de dur et chaud », se souvient la jeune victime à la barre alors qu’elle témoigne de son agression, qui remonte au 19 octobre. « C’était bondé, au début je me suis dit que c’était normal, explique-t-elle encore. En fait, il avait sorti son sexe. » La jeune femme, qui travaille dans le quartier d’affaires et emprunte le T2 tous les jours, précise avoir crié, « pour que tout le monde se rende bien compte ».

Mais aucune aide ne viendra de la part des nombreux passagers autour d’elle. « Alors, clairement, je lui ai mis mon poing dans la figure », explique-t-elle, comme en s’excusant. Malgré la peur et la montée d’adrénaline qu’elle a pu ressentir, la jeune femme a ensuite eu un réflexe qui, plus tard, permettra l’arrestation de son agresseur : « Je l’ai pris en photo ».

Elle tente ensuite d’alerter des agents présents sur le quai, à la Défense. Mais l’homme est déjà loin. « Je suis arrivée en retard au travail et quand j’ai expliqué pourquoi à mon patron, il m’a dit que c’était très grave, et qu’il fallait absolument que je porte plainte », poursuit la jeune victime, alors qu’en face d’elle dans la salle, le prévenu reste muet.

Un peu plus tard, toujours dans la matinée, c’est un nouveau choc que vit la jeune femme. « Là, je m’aperçois qu’il y a des tâches sur mon pantalon noir. Je l’ai lavé, je ne pouvais pas le garder toute la journée », explique celle qui a finalement acheté un nouveau pantalon à sa pause à midi. Le soir, une fois rentrée à Colombes, elle décide de porter plainte au commissariat.

Dans la salle d’audience ce jour-là, le frotteur comparait libre et assisté de deux interprètes. Il nie les faits. Lorsqu’on lui présente la photographie de lui prise par la victime juste après l’agression, il jure : « ce n’est pas moi ». Pourtant, une semaine après les faits, la jeune femme le croise à nouveau dans le T2.

« J’ai appelé mon patron, je ne savais pas quoi faire. Il m’a dit de m’éloigner. La police aussi, parce que ça pouvait me mettre en danger », explique-t-elle. Mais après « une semaine de nuits blanches », elle fait preuve d’un caractère qui force l’admiration d’un bon nombre de personnes présentes dans la salle d’audience mardi 4 février. « Je l’ai attrapé par la capuche et je l’ai amené à des agents sur le quai en leur disant qu’il m’avait agressée une semaine avant », explique-t-elle.

« Elle a fait l’enquête toute seule », assure son avocat qui poursuit en martelant que sa cliente veut entendre les justifications du prévenu. « Je suis quelqu’un qui a une entière confiance en elle, et là, je me demande ce que j’ai pu lui faire, souffle-t-elle. Peut-être que j’étais habillée trop serrée, je ne sais pas. »

Mais le prévenu, d’origine soudanaise, reste impassible et se contente de nier. Il ne répondra à aucune question du procureur ou du président de séance. « Je suis devant quelqu’un qui s’en fout » déplore la victime. Le prévenu a cependant répondu à quelques questions d’une psychologue, mandatée pour évaluer son état de santé mentale avant le procès.

Si elle a estimé qu’il était apte à être jugé, elle a aussi noté son « caractère psychopathe et antisocial ». Le procureur de son côté note « une absence totale de réflexion sur son comportement », lors de ses réquisitions. Il demande au tribunal de le condamner à un an de prison dont six mois avec sursis, en plus d’une obligation de soins estimant qu’« il y a un long travail à faire ».

L’avocat de la jeune femme a quant à lui insisté sur « l’humiliation » qu’a subi sa cliente. Mais là encore, la personne qui semble la plus à même de défendre cette victime au caractère en acier trempé, c’est elle-même. « Et si ça avait été quelqu’un d’autre, qu’est ce qu’il aurait fait, demande-t-elle au magistrat. Une enfant, une femme en jupe… Il l’aurait peut-être pénétrée ».

Le frotteur est finalement condamné à un an de prison ferme, avec mandat de dépôt. À sa sortie de prison, l’homme sera en plus interdit de territoire. Enfin, il est condamné à dédommager la victime, la somme sera cependant évaluée ultérieurement, en novembre prochain.

Bouche-bée, la jeune femme voit donc son agresseur se faire menotter et être emmené en prison. Si son agression a évidemment été un choc, la mise sous écrou de son agresseur semble l’être aussi, à en voir son visage défait, et les regards remplis d’incompréhension qu’elle lance à un proche venu la soutenir et assis dans le public.

Victime d’agression dans les transports :
comment alerter ?

Selon une enquête de la Fnaut, 87 % des usagères des transports en commun « déclarent avoir déjà été victimes de harcèlement sexiste, de harcèlement sexuel, d’agressions sexuelles ou de viols dans les transports en commun ». Pour palier ces trop nombreuses agressions, Ile-de-France Mobilités a mis en place de nombreux moyens d’alerte, dont un numéro unique : le 31 17 (ou par SMS au 31177, Ndlr).

Ce numéro commun est accessible à n’importe quelle heure, tous les jours de l’année. Et ces moyens de signalement semblent porter leurs fruits. Ainsi, en mars dernier, le JDD dévoilait que 1 159 agressions sexuelles avaient été signalées dans les transports en commun franciliens en 2018 : une hausse de 30 % par rapport à l’année précédente. Pourtant, le chemin semble encore être long : seules 10 % des femmes victimes portent plainte.

RAPPEL
Les condamnations en première instance ne sont pas définitives puisque susceptibles d’appel. Jusqu’à leur condamnation définitive, les prévenus sont donc toujours présumés innocents.

PHOTO : ILLUSTRATION / LA GAZETTE DE LA DEFENSE