Ils étaient des dizaines de salariés, réunis à l’appel d’une intersyndicale, à manifester au pied du siège de Suez et dans plusieurs villes de France mardi 8 septembre pour dire « Non à l’OPA ! ». Alors que le PDG de Suez, Bertrand Camus, devrait présenter cette semaine son plan de bataille pour contrer l’opération de rachat de son concurrent Veolia, son personnel se mobilise pour tenter de sauver la filière eau du groupe, promise à la vente à un fonds d’investissement en cas de rachat de Veolia.

Des milliers d’emplois seraient menacés d’après les organisations syndicales, qui craignent des suppressions de postes à la Défense mais aussi dans d’autres sites en régions. C’est surtout le manque de visibilité sur leur avenir qu’ils dénoncent, alors que le gouvernement s’est dit favorable à la fusion des deux géants français de la gestion de l’eau et des déchets. L’appel au débrayage aurait été très suivi, aux dires des organisations syndicales, malgré le contexte sanitaire.

C’était le 30 août dernier, Veolia présentait à la fin de l’été, une offre de rachat de 29,9 % des 32 % de participations d’Engie dans Suez. Une OPA lancée pour s’emparer de son plus gros concurrent français (voir notre édition du 9 septembre 2020) et qui reste valable jusqu’au 30 septembre prochain. Pour l’heure, Engie n’a pas encore accepté l’offre. L’État, actionnaire de cette dernière, s’est déjà montré favorable à la fusion des deux entreprises hexagonales.

Bertrand Camus, PDG de Suez, compte bien répliquer à cette action jugée « agressive ». Il espère s’allier à des fonds d’infrastructures, comme Ardian ou Antin, pour acquérir les parts dont Engie veut se séparer. Une vente d’actifs, dont sa filière eau aux États-Unis, est aussi évoquée pour faire remonter le cours de boursier.

Malgré la volonté affichée de la direction de ne pas se laisser avaler par Veolia, mardi 8 septembre, des dizaines de salariés se sont rassemblés à l’entrée du siège de Suez à la Défense, devant la tour CB21 comme ailleurs en France et ont exprimé leur peur de perdre leur emploi. « Environ 70 % des salariés se sont mobilisés, nous assure Noui Bourahli, responsable syndical Force Ouvrière chez Suez. Mais beaucoup étaient en télétravail et ne se sont donc pas déplacés ». La direction nous a assuré soutenir l’initiative : « Bien évidemment compte-tenu du contexte, la Direction Générale, le conseil d’administration et le Président du Groupe ont soutenu la manifestation de mardi dernier ».

À l’image du président du conseil d’administration de Suez, Philippe Varin, Noui Bourahli estime que les 500 millions d’euros de « synergies » annoncées par Veolia en cas de rachat, est le signe annonciateur de plans de départ. « Il y aura de la casse sociale, prévient-il. On estime à 3 000 le nombre de postes supprimés à terme à cause des reclassements de salariés et des licenciements ». Les syndicats redoutent surtout la revente d’Osis, la filière eau de Suez, à un fonds d’investissement français, Meridiam, qui ne garantirait pas le même statut et avantages aux salariés, aujourd’hui protégés par des conventions collectives.

Outre le département gestion et distribution d’eau, qui gère 40 % du réseau français, Veolia entendrait se délester des activités de traitement des déchets de Suez, selon Force Ouvrière. « Ils ne peuvent pas reprendre la partie collecte et traitement des déchets à cause de l’Autorité de la concurrence. De toute façon, c’est tout ce qui est ingénierie et centres de recherches qui intéresse véritablement Veolia ». Les syndicats entendent mener d’autres actions dans les semaines à venir pour faire entendre leur voix.

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