Un cinquantenaire résidant à Montrouge comparaissait pour des violences conjugales qui avaient eu lieu durant le confinement, mercredi 9 septembre au tribunal de Nanterre. Soutenu par sa compagne, qui avait pourtant porté plainte contre lui, il a écopé d’une peine de prison avec sursis. Le tribunal a été particulièrement insistant auprès de la femme, et n’a pas hésité à longuement la questionner sur les violences qu’elle subissait quotidiennement.

« Il n’a même pas commencé à se soigner pour l’alcool, lance un assesseur à la femme. Pourquoi vous pensez qu’il va changer ? » Le prévenu, accusé de violences conjugales durant le confinement, devait apporter au tribunal des justificatifs de soin pour son addiction à l’alcool. Prétextant ne pas avoir eu le temps depuis le mois de mars, l’homme est ainsi venu les mains vides devant le tribunal.

La femme à la barre, a porté plainte contre son mari à la suite d’un énième épisode de violence entraînant cette fois, trois jours d’incapacité totale de travail (ITT). Si elle s’est confiée auprès des policiers au lendemain des violences, elle défend maintenant son époux, se disant persuadée de sa capacité à changer. Lui de son côté, ne reconnaît que partiellement les faits.

Mais, le fils de celle-ci a livré un témoignage précieux aux policiers en assurant qu’elle était battue « tous les jours ». Le tribunal inquiet tente d’ouvrir les yeux à la victimetrès angoissée à la barre. « Et donc, si ça continue, on vous revoit la semaine prochaine c’est ça ? », lui demande un assesseur.

« Non, la prochaine fois je ne reviendrai pas ici », souffle la femme. Cette phrase, qui fait comprendre aux magistrats qu’elle ne portera plus plainte si de tels faits étaient réitérés, inquiète le tribunal dont certains membres n’hésitent pas à hausser le ton. « Je ne ferai rien, je l’aime tellement que je ne ferai rien », poursuit la femme, qui a été séparée de son mari depuis mars, à cause de mesures d’éloignement.

Pourtant, elle avait assuré vouloir se séparer devant les policiers. « Pourquoi avez-vous changé d’avis ? » Si elle évoque au début l’amour qu’elle voue à son compagnon, quelques larmes coulent sur sa joue lorsqu’elle lâche : « mes revenus sont trop bas ». Impuissants, les magistrats continuent à interroger la victime, qui explique ses bleus et égratignures par des maladresses dues à son alcoolisation.

Le quinquagénaire de son côté déroule une version des faits dans laquelle, ivre lui aussi, il se serait disputé avec sa compagne. Elle lui aurait alors « sauté dessus », il n’aurait « fait qu’essayer qu’elle [le] relâche ». L’homme rejette par ailleurs en bloc les accusations du fils de sa compagne le décrivant comme un homme violent.

« Je ne partage ni la version de madame ni la version de monsieur », explique la procureure dans ses réquisitions. « On voit malheureusement le chemin qu’elle a pris depuis les faits », regrette-t-elle avant de requérir six mois de sursis probatoire intégral contre l’homme qui comparait libre. De son côté, l’avocate du prévenu plaide pour une relaxe « au bénéfice du doute ». Elle estime qu’aucun témoin n’était présent au moment des faits, les rendant difficiles à caractériser.

Le tribunal suit exactement les réquisitions de la procureure. L’homme sans emploi, titulaire d’une pension d’invalidité et déjà condamné pour des violences conjugales, écope aussi d’une obligation de soin pour ses problèmes avec l’alcool. « Si vous retouchez à madame, c’est la prison direct », lui lance fermement la présidente de séance.

RAPPEL
Les condamnations en première instance ne sont pas définitives puisque susceptibles d’appel. Jusqu’à leur condamnation définitive, les prévenus sont donc toujours présumés innocents.

PHOTO : ILLUSTRATION / LA GAZETTE DE LA DEFENSE