C’est un père dans la tourmente qui était jugé mardi 10 décembre, au Tribunal de grande instance (TGI) de Nanterre. Le jeune homme de 25 ans, résidant à Issy-les-Moulineaux, était accusé d’avoir violemment agressé le nouveau compagnon de son ex-femme et mère de sa petite fille de trois ans qu’il n’a pas vu depuis un an. La victime, présente dans la salle, a reconnu la fille du prévenu quelques jours auparavant.

La situation très complexe a pris un tour violent au début du mois de septembre lorsque blessé, le prévenu s’est présenté au domicile de la victime. Entre eux, une dispute a rapidement éclaté et le père biologique a violemment frappé le père « officiel » de l’enfant avec un sabre décoratif. La victime s’est vu prescrire 15 jours d’incapacité totale de travail (ITT). Le prévenu a écopé d’une peine de prison avec sursis.

« Ce n’est pas le client habituel d’une salle d’audience, constate le procureur. Mais il entre par la grande porte ». Sur le banc des accusés, un jeune homme de 25 ans au casier judiciaire vierge. Au début du mois de septembre dernier, il a violemment agressé un autre homme, qui se trouve être le nouveau compagnon de son ex-femme, à coups de sabre. La victime assure avoir encore des séquelles et s’est vu prescrire 15 jours d’incapacité totale de travail (ITT).

L’histoire qui a mené à cette agression est complexe. Le prévenu a vécu avec une femme durant neuf ans. En 2016, naît une petite fille. Un « bébé désiré » par les deux parents, mais la mère lui demande de ne pas la reconnaître. « Elle avait des difficultés financières, c’était pour avoir l’allocation de la CAF », illustre l’avocat de la défense. Ils élèvent ensemble la petite, jusqu’au jour où le couple se sépare, à la fin de l’année 2018. Elle lui fait comprendre qu’il n’a aucun droit sur l’enfant.

« Je n’ai pas vu ma fille depuis un an », confie le prévenu, très touché par l’affaire. En mai, il l’a reconnue, pensant enfin pouvoir la voir à nouveau. Mais le 23 août, il reçoit une lettre du procureur, lui indiquant que sa demande n’a pas abouti : un autre homme a reconnu l’enfant quelques jours avant lui.

« La reconnaissance de sa fille, ça lui importait peu », assure l’avocate de la partie civile. Elle pointe du doigt le fait qu’il n’ait lancé la procédure qu’en mai dernier. « Je ne savais pas qu’il n’y avait pas besoin du consentement de la mère, plaide-t-il. Et je ne me suis jamais occupé des tâches administratives. C’était mon ex-compagne qui le faisait. »

Deux semaines plus tard, le prévenu se présente donc au domicile de son ex-compagne, qu’elle partage avec la victime, au Plessis-Robinson. « Je me suis présenté à son domicile pour voir ma fille, pas pour une quelconque altercation », se défend le prévenu. Pourtant, c’est l’homme qui a reconnu sa fille qui ouvre la porte, et la situation s’envenime rapidement.

« Là, il me dit que je ne la reverrai pas », se souvient le prévenu. « Il m’a étranglé avec son bras et mis au sol », poursuit la victime. Ce dernier court alors dans sa chambre pour se saisir d’un sabre d’ornement, « pour se défendre », explique son avocate. Mais physiquement, la victime ne fait pas le poids face au père biologique de la petite fille qui lui arrache le sabre des mains. S’en suit « une multitude de coups », la victime est blessée « au bras, au mollet, à la cuisse et au flanc », énumère le président de séance.

« Je regrette ce qu’il s’est passé ce jour-là. Je voulais voir ma fille », assure le prévenu qui s’est ensuite enfuit. « Et à votre avis, cette sortie d’une extrême violence va jouer en votre faveur pour la garde de votre enfant ? », lui assène le procureur. Le prévenu baisse la tête, il a lancé une action en justice pour que « la reconnaissance illégale » de sa fille soit annulée. « Il sait très bien que je suis le père biologique », poursuit-il.

La victime le reconnaît d’ailleurs aisément. « Pour moi, les liens du sang ne comptent pas, lâche-t-il. Cette petite, elle m’appelle papa, je la conduis à l’école, je lui fais à manger, je lui lis une histoire avant de dormir. » Une phrase qui émeut le père biologique de la petite fille, assis tout près. « On m’a volé ma fille », estime-t-il.

« Il va falloir qu’il comprenne qu’il n’est pas le père, lui lance l’avocat de la défense. Au plan moral, il commet presque une faute en reconnaissant l’enfant ». Mais bien que cette affaire soit très longuement évoquée, ce sont bien les coups qui sont jugés par le tribunal de Nanterre. Par la voix de son avocate, la victime explique avoir encore des séquelles de l’agression.

Barman, il éprouve encore « des difficultés dans son travail », suite aux coups qu’il a notamment reçus au bras. Il fait « encore des séances de kiné » insiste son avocate. Et le procureur ne s’y trompe pas, et se montre particulièrement sévère à l’encontre du prévenu. « On ne lui conteste pas le droit d’être malheureux ou en colère, commence-t-il. Mais je vais requérir une peine assez importante. » En effet, le ministère public demande 18 mois de prison, dont neuf assortis du sursis.

« La discussion ne s’est pas passée entre gentlemen, concède l’avocat de la défense. Mais s’il se retrouve là, c’est à cause de cette violence juridique ». Revenant sur la période très sombre que vit son client, l’avocat demande au tribunal de le condamner à une peine « qui permettra le retour de l’enfant ».

Finalement, le prévenu écope de huit mois de prison avec sursis et doit en plus dédommager la victime à hauteur de 2 960 euros au total. Les deux hommes, qui semblaient alors bien loin d’arriver à un terrain d’entente, se retrouveront une nouvelle fois devant un tribunal, pour l’affaire de la reconnaissance de la petite fille cette fois.

Cette nouvelle procédure est une nouvelle épreuve pour le père biologique : quelques jours avant le procès du mardi 10 décembre, la mère a écrit plusieurs lettres l’accusant « d’avoir été un père et un compagnon horrible », dénonce l’avocat de la défense. Il a aussi ajouté « qu’aucune plainte » pour violences conjugales n’avait jamais été déposée.

RAPPEL
Les condamnations en première instance ne sont pas définitives puisque susceptibles d’appel. Jusqu’à leur condamnation définitive, les prévenus sont donc toujours présumés innocents.

PHOTO : ILLUSTRATION / LA GAZETTE DE LA DEFENSE