« Tout le monde comprendra qu’on n’a pas forcément la même vision de la politique du logement sur le territoire », expose très directement sa présidente. L’office municipal HLM de Nanterre, s’il ne change pas de statut, sera contraint de fusionner avec ses voisins de Courbevoie, Puteaux et Levallois-Perret, par la loi portant Evolution du logement de l’aménagement et du numérique (Elan). Mais il veut échapper à cette obligation. Ses responsables sont donc en train de changer les statuts de l’organisme public pour le transformer en coopérative.

« Si demain, nous ne faisons rien, au 1er janvier 2021, la loi Elan s’applique, avec un regroupement des quatre offices et au plus tard une perspective de fusion au 1er janvier 2023, et ça, c’est la mort de toutes les valeurs et principes qui dirigent l’office depuis sa création, analyse Marie-Claude Garel (PCF), la présidente de l’office nanterrien dont le nombre de logements est trop faible pour rester autonome. Confrontés à cette situation, nous avons étudié l’ensemble des choses possibles. »

« Les offices ne sont pas des entreprises mais des outils au service de la collectivité, qui les crée pour mettre en oeuvre sa politique du logement, défend-elle du principe choisi par les élus de la majorité de gauche au pouvoir. C’est ce qui permet qu’à Nanterre, on ait encore des ouvriers, des gens qui gagnent le Smic et vivent de leur travail, ce qui est de moins en moins le cas sur le territoire… »

Alors, pas question de s’allier avec les bailleurs sociaux des autres communes aux majorités de droite, dont elle dénonce « une volonté délibérée de rester dans l’entre-soi, d’exclure les populations qui vivent difficilement ». L’office municipal HLM devrait donc être transformé en une Société coopérative d’intérêt collectif (SCIC), statut qui lui permettrait de rester indépendant.

Pour aller le plus vite possible, une formule plutôt originale a été choisie. « Soit la ville crée de A à Z une coopérative, soit on rachète une coquille vide dont il ne reste que la structure juridique », explique Marie-Claude Garel. En l’occurrence, la municipalité va acquérir une de ces coquilles vides auprès « du groupe émanant de France habitation et Action logement ».

« C’est une très bonne astuce », estime Alexandre Guillemaud, président de l’Union nationale des locataires indépendants (Unli) de Nanterre (et conseiller municipal UDI d’opposition, Ndlr). « L’Unli n’a pas à discuter des questions politiques, on sera juste très vigilant à ce que les locataires ne soient pas lésés », prévient-il tout en précisant : « Les élections de locataires ne seront plus obligatoires par exemple, alors, j’espère que la démocratie des locataires continuera à vivre. »

Quelques obstacles restent à franchir. Il faudra obtenir l’autorisation de l’État pour ce transfert, et former un groupement de coopératives de logement, lui aussi rendu obligatoire par la loi Elan. Mais aussi négocier le changement de statut auprès du personnel, encore composé de « 40 % de fonctionnaires », ce qui est incompatible avec une SCIC. Alors, « notre personnel fonctionnaire est obligatoirement amené à s’éteindre », prévient la présidente de l’office nanterrien.

Marie-Claude Garel compte bien faire voter en mars prochain le traité de fusion entre l’office et la coopérative « coquille vide », malgré d’importantes complexités administratives (il faut que l’office produise son compte administratif, rarement prêt si tôt, Ndlr). « C’est un très beau projet, et en plus un projet qui, au-delà d’échapper à cette contrainte des lois qui s’applique, a du sens quand on voit ce qu’est la politique de la Ville sur l’habitat », plaide la présidente. « Ils veulent verrouiller les choses en cas de changement de couleur politique de la ville », analyse de son côté le président de l’Unli.