Verra le jour, verra pas le jour ? Un mini-psychodrame s’est noué la semaine dernière autour du projet de tours résidentielles Hermitage. Suite à un article portant sur la suppression des deux tours de 320 m de la maquette de la Défense par l’établissement public qui aménage le quartier d’affaires, le promoteur Hermitage plaza a envoyé un communiqué annonçant le lancement des travaux préparatoires et une fin de chantier en 2024. Mais l’établissement public Paris La Défense a réitéré, le lendemain soir en réunion publique la fin de non-recevoir déjà indiquée avant l’été.

Lundi 7 octobre, le site internet d’actualité locale Defense-92.fr rapporte la suppression du projet des deux tours résidentielles du promoteur Hermitage plaza au sein de la maquette géante présente dans les locaux de Paris La Défense, l’établissement aménageur et gestionnaire du quartier d’affaires. « À la place trône désormais… rien. Juste un carré blanc », relève sèchement le site internet, qui rappelle qu’en juin dernier, la directrice générale de Paris La Défense, Marie-Célie Guillaume, annonçait : « Ce projet est terminé. »

Pendant des années, le projet Hermitage trônait sur la maquette de Paris La Défense (ci-dessus).

Depuis plus de dix ans, le Russe Emin Iskenderov assure qu’il va constuire à l’entrée du quartier, sur la droite en venant du pont de Neuilly, deux tours résidentielles de 320 m de haut. Dessinées par Norman Foster, prévoyant près de 700 appartements de luxe ainsi qu’un hôtel cinq étoiles de 200 chambres, le tout représente un budget avoisinant les 3 milliards d’euros… que le promoteur peine à réunir. Au point que son projet, au chantier annoncé comme imminent depuis plusieurs années, lasse la directrice générale de Paris La Défense, comme son président et patron du Département, Patrick Devedjian (LR).

Dans l’après-midi du lundi 7 octobre, pourtant, un communiqué d’Hermitage Plaza annonce que « les travaux préparatoires ont démarré ». Le promoteur assure du lancement de ces chantiers depuis le 30 septembre, par « les travaux de curage et désamiantage intérieur de l’immeuble Bretagne ». Ceux-ci auraient été rendus possibles « suite à la purge définitive, le 13 mai, des recours contre les permis de construire » issus des locataires des logements sociaux de trois immeubles de la résidence des Damiers, propriété de RATP habitat.

Depuis quelques semaines, les deux tours en ont pourtant été purement et simplement supprimées

« Hermitage a levé cet été une première tranche du financement des travaux préalables à la construction de son projet, et une deuxième tranche sera mise en place d’ici la fin de l’année pour couvrir la totalité des coûts de cette phase de pré-construction et amener le projet au stade du lancement de la construction, annonce aussi le promoteur. Le planning prévisionnel de l’opération est de clore cette première phase avant l’automne 2020 et d’enchaîner avec la construction afin de pouvoir livrer les deux tours pour les Jeux olympiques d’été 2024 à Paris et la totalité du projet dans l’année qui suivra. »

Pourtant, le lendemain, mardi soir, lors d’une réunion publique de chantier dédiée aux riverains, Paris La Défense se montre extrêmement claire : « Aujourd’hui, le projet Hermitage est arrêté […] ce n’est même plus une question d’y croire ou ne pas y croire, aujourd’hui, il n’y a même plus de contrat », commente sans ambiguïté une responsable. « L’accord avait un délai, et nous n’avons pas réitéré l’accord », confirme ensuite un chef de projet de Paris La Défense.

« Notre projet a bel et bien démarré et les délais seront ceux du communiqué », indique pourtant en réponse Emin Iskenderov, sollicité par La Gazette. « Les accords […] sont bel et bien valides jusqu’à la fin juin 2020 », assure-t-il par ailleurs. Qu’Hermitage se fasse ou pas, les dix années passées ont laissé des traces : certaines copropriétés privées jouxtant le projet se dégradent dangereusement, faute d’un ravalement au financement promis par Emin Iskenderov, tandis que les abords de la place des Saisons vont devoir être prochainement rénovés sans attendre les toujours hypothétiques tours (voir encadré).

Le réaménagement du quartier des Saisons n’attend plus Hermitage

Faute de voir émerger les deux tours du projet Hermitage, et face à des revêtements qui deviennent dangereux à force d’attente, l’établissement public d’aménagement et de gestion du quartier d’affaires, Paris La Défense, va réaménager le quartier Saisons. Des pistes ont été proposées à ses habitants lors d’une réunion d’information, mardi 8 octobre dernier.

« À l’époque, il y avait effectivement le réflexe d’attendre une opération immobilière pour réhabiliter un quartier, toute une place, reconnaît un chef de projet de Paris La Défense. On n’est plus dans cette logique-là. » L’établissement prévoit en particulier une maintenance accrue des dalles. « Une dame de la résidence de l’Ancre […] s’est fracturée le genou, et a été handicapée de longs mois, elle s’est enfoncée dans une dalle », a en effet déploré vivement, comme la confirmation d’un besoin urgent, une habitante de la place des Dominos.

« On a eu écho de l’état de dangerosité de ces dalles, assure une représentante de Paris La Défense. Nous sommes en lien avec le PC sécurité qui réalise des rondes, et qui peut nous signaler et sécuriser les zones jusqu’à l’arrivée des équipes de la régie. » En outre, il est envisagé une végétalisation accrue du quartier avec « de nouveaux arbres et végétaux plus résistants aux chaleurs », ainsi que le retrait des chemins constitués de lattes de bois du quartier.

Parmi les options étudiées dans le cadre du réaménagement figure « l’installation d’une aire de jeux plus qualitative ». Une proposition qui ne ravit pas les riverains. « Les aires de jeux posent problème particulièrement à la résidence de l’Ancre, réagit une habitante de l’immeuble. L’aire de jeu en face de la façade Nord de la tour de First, ça passe, mais sur la place même, ça pose énormément problèmes. » L’idée n’est cependant pas totalement rejetée, à condition que « le square [soit] fermé le soir et la nuit », déclare une autre résidente.

« Il ne serait pas possible de mettre en place un jardin potager à la place ? », demande une de ses voisines. « C’est quelque chose que l’on peut tout à fait mettre en place », estime la représentante de Paris La Défense. Quatre jardins potagers ont en effet déjà été installés sur le quartier d’affaires : reste à savoir si celui-ci remplacerait ou jouxterait la potentielle aire de jeu.