En 2015, trois salariées de la ­Défense ont lancé CFDT’elles, un réseau syndical interne de femmes de la branche des Industries électriques et gazières (IEG), pour tenter de répondre à certaines de leurs questions qui restaient sans réponses dans un secteur très majoritairement masculin. Mais l’ambition sous-jacente était aussi de faire une place plus importante aux femmes au sein des organisations syndicales, qui reproduisaient elles-mêmes un plafond de verre à leur égard.

Pour les fondatrices de CFDT’elles, qui compte 170 adhérents dont environ 20 % d’hommes, les choses sont en train de bouger pour les femmes, même si cela prend du temps. « On voit une évolution très rapide depuis deux ans, depuis balance ton porc ou le mouvement #metoo », déclare Aurore Martin, co-fondatrice du réseau et salariée chez Engie, le 28 mai dernier, lors d’une journée d’échanges CFDT’elles dans les locaux de l’union départementale des Hauts-de-Seine. Et d’annoncer que la confédération CFDT IEG allait reprendre le réseau et le développer à son échelle.

« Nous étions trois femmes à se poser des questions par rapport à notre place dans l’organisation syndicale, explique Catherine Guichardan, salariée détachée d’EDF à la branche des IEG de la CFDT. Par rapport au plafond de verre auquel on se heurtait, qui nous empêchait d’accéder à de plus hautes fonctions, ou d’évoluer dans l’organisation. » Les trois co-fondatrices ont eu alors l’idée de créer un réseau pour s’aider mutuellement, et « montrer aux hommes de l’organisation syndicale qu’on existait », précise Catherine Guichardan.

Pourtant, ce n’était pas chose aisée. « On a du mal à amener les femmes vers le syndicalisme, explique Aurore Martin. Mais les hommes ont aussi du mal, mes collègues me renvoyaient les tracts à la figure quand on a commencé. » La branche IEG est en effet une branche très masculine, où certaines professions ne dépassent pas les 14 % de femmes, « surtout dans les métiers dits opérationnels comme à Cofely chez Engie », précise Aurore Martin. Même si la syndicaliste estime que la situation « change », elle souhaiterait que d’autres fédérations se saisissent du réseau.

« Il y a des sujets où les femmes ne veulent pas en parler à nos militants hommes », rapporte Aurore Martin, qui se souvient d’une salariée en état de choc suite à son divorce. « J’avais un collègue homme qui la connaissait très bien, mais elle s’est adressée à nous CFDT’elles », se rappelle-t-elle. « Nous suivons pas mal de situations de femmes qui connaissent des formes de harcèlement moral, ou qui ont des questions sur leurs carrières, plutôt que des femmes qui luttent vraiment pour un problème politique, de leur égalité », indique Catherine Guichardan.

Une des raisons qui ont conduit Aurore Martin a créer le réseau CFDT’elles réside dans un manque d’informations criant sur les dispositifs mis en place pour les femmes lorsqu’elles deviennent mères. « J’avais des questionnements sur la garde des enfants, l’allaitement, explique-t-elle. Il n’y avait pas beaucoup d’informations dans l’entreprise, parce que le statut était fait par des gars et pour des gars. » La syndicaliste a alors commencé a créer des fiches explicatives pour toutes les femmes, pour être plus efficace, et a d’ailleurs obtenu la création d’une salle d’allaitement.

Elvire, adhérente depuis trois mois au réseau CFDT’elles et salariée chez EDF, était également présente à cette journée du 28 mai. « Je me suis intéressée à ce réseau pour le côté ouvert et inter-entreprises, pour entendre d’autres visions et de façons de faire, plutôt que de me tourner vers des réseaux d’entreprises féminins trop élitistes », explique-t-elle. Elle qui a connu la « mise au placard » dit s’être engagée au départ pour « défendre la cause des femmes », mais surtout pour connaître les différents « moyens d’action pour faire bouger les choses ».

S’il reste encore du chemin à faire pour que les femmes soient à égalité avec les hommes, notamment dans la branche des IEG, les femmes de la CFDT’elles estiment que les choses bougent. « La confédération a décidé de se saisir de la problématique des violences faites aux femmes, et de l’égalité au sein des entreprises, mais également au sein de la CFDT », déclare ainsi Aurore Martin.