Qui aurait cru que la Défense, quartier minéral fait de béton et de verre, puisse accueillir en son sein des écrins de verdure totalisant 11 hectares ? Plus de 2 000 arbres, quatre parcs et bientôt quatre jardins partagés, ainsi que de nombreuses zones végétalisées composent le paysage du quartier d’affaires. Paris La Défense, l’organisme public de gestion et d’aménagement de la Défense, compte d’ailleurs leur faire décrocher le label Ecojardin. L’établissement y travaille de pair avec un atelier paysagiste, Fois, et une entreprise d’entretien des espaces verts, Botanica.

Représentant un coût annuel de fonctionnement et d’entretien d’environ 800 000 euros pour Paris La Défense, arrosage compris, les espaces verts du quartier sont désormais gérés de façon différenciée. Plutôt que de systématiser un entretien intensif, il est privilégié un panel de traitements en fonction des usages des différents espaces, certains veillés de près, d’autres laissés dans un état moins artificiel. Cette technique nécessiterait cependant beaucoup de communication, ce mode de gestion pouvant laisser penser aux plus exigeants des usagers que certains espaces sont en friche.

« Il est important d’éduquer les gens », souligne le représentant de l’établissement public, qui vise l’obtention du label Ecojardin. Outil de communication et de reconnaissance, le label assure que le gestionnaire du site est bien engagé dans une démarche globale de gestion écologique. Pour l’obtenir, Paris La Défense mise notamment sur la gestion différenciée de ses espaces verts. « Le but est d’adapter l’entretien par rapport aux usages du site, souligne Audrey Theninge, conductrice de travaux pour Botanica, rencontrée sur l’esplanade de la Défense le 18 avril dernier, aux côtés de responsables de l’atelier Fois et de Paris La Défense.

« Nous avons un entretien intensif généralement sur les lieux très fréquentés, un niveau semi-intensif sur des lieux moins fréquentés comme les abords des résidences, et extensif au niveau de la voirie », explique la salariée de Botanica (l’entreprise s’occupe du lot de maintenance des espaces verts, et a décroché le dernier appel d’offres, fin 2018, pour quatre années supplémentaires, Ndlr). Les massifs de fleurs entretenus et contenus de manière très visible côtoient ainsi des lieux où il est laissé plus de liberté à la nature. L’idée centrale ? Pratiquer le bon entretien au bon endroit.

« Avant la gestion différenciée, il y avait trop souvent des déchets de tonte qui créaient des coûts supplémentaires, se souvient Audrey Theninge. Avant, on tondait les pelouses tous les quinze jours. Aujourd’hui, on tond une bande de 60 cm le long des bordures, et on laisse le reste au milieu pousser en prairie. » Selon la conductrice de travaux, cela permet de recréer une biodiversité, en permettant aux papillons et aux petits animaux de trouver des abris.

Pour éviter des critiques infondées sur sa gestion différenciée, Paris La Défense a besoin de communiquer, et a donc installé des panneaux d’information près des pelouses.

La gestion différenciée s’applique également aux platanes historiques de la Défense. « On ne les taille plus en carré comme avant, on les taille en forme naturelle, à la main, avec un sécateur » indique-t-on chez Botanica, dont l’équipe est composée de 10 salariés à temps plein exerçant du lundi au vendredi.

Cette pratique, avancée comme plus écologique, n’est pas sans gains économiques, en ajustant au plus près les moyens mis en œuvre pour chaque espace végétalisé. « Paris La Défense a commencé un travail de collecte de données, qui permet de mieux connaître les espaces verts, et les caractéristiques des sols et de la dalle, explique par ailleurs Elodie Gueyton, de la direction des services urbains chez Paris La Défense. La prochaine étape est l’obtention du label Ecojardin, qui récompense et atteste de la qualité écologique de la gestion des espaces végétalisés. »

L’établissement utilise déjà le désherbage manuel, le paillage pour conserver l’humidité, ainsi que la diminution de l’arrosage artificiel au profit d’une récupération des eaux pluviales. « On réfléchit actuellement à produire sur place notre propre compost, indique la salariée de Paris La Défense, et à travailler avec les restaurants inter-entreprises pour récupérer les restes des cantines, pour les transformer en compost et le réutiliser sur les sites dans le cadre des opérations d’entretien. »

La gestion différenciée des espaces publics n’est pourtant pas comprise par tout le monde. « Les gens pensent souvent que si une pelouse n’est pas tondue, c’est qu’elle n’est pas bien entretenue, explique Carolina Fois, fondatrice de l’atelier Fois. Il faut que ce soit propre, carré pour eux. » Selon l’architecte paysagiste, la nouvelle sensibilité de la gestion différenciée n’est donc pas encore bien comprise. « On a une histoire entière d’une certaine façon de jardiner, ce n’est pas simple de changer les mentalités », analyse-t-elle.

« C’est très important de communiquer sur la gestion différenciée, justement, pour informer les gens, explique Elodie Gueyton pour Paris La Défense. On a installé des panneaux d’information près des pelouses par exemple, ou des silhouettes pour annoncer les données écologiques par exemple, on essaye de communiquer de plus en plus. »