Poursuivis pour avoir détenu, transporté, acquis, offert, cédé et employé illicitement des stupéfiants entre septembre et décembre 2021 dans les départements des Hauts-de-Seine, Yvelines et la Seine-Saint-Denis, deux hommes, âgés de 18 ans et 26 ans étaient présentés devant le juge dans le cadre d’une comparution immédiate, lundi 3 janvier 2022, au tribunal correctionnel de Nanterre.

À Montrouge, lors d’une banale patrouille dans la journée du 14 décembre dernier, les policiers procèdent à une filature d’un conducteur suspect d’une Citroën C3.
Les agents constatent que le conducteur est au téléphone. Ils décident alors de contrôler le supposé titulaire du véhicule, âgé de 18 ans. Lors du contrôle des papiers du jeune homme, qui s’avère être en défaut de permis, les forces de l’ordre respirent une forte odeur. « Ça commence à se gâter », précisera la présidente du tribunal à la lecture du dossier.

Ils reconnaissent l’odeur caractéristique du cannabis et finissent par découvrir dans le fond du tableau de bord deux plaquettes de drogue d’environ 250 grammes estampillées « Wanted dead or alive ». Lors de l’arrestation, le jeune homme, très coopérant, remet aux policiers un téléphone.

« Votre téléphone est une mine de renseignements pour les enquêteurs », ironisera la présidente en s’appuyant sur des photos du téléphone. « On remarque des conversations très poétiques entre vous et un commanditaire». Une perquisition au domicile a permis de trouver 1 300 euros en espèce, qui était « à l’oncle » du présumé coupable et 500 euros, appartenant à sa mère. Toutefois cette justification ne « tient pas la route », annonce la juge. Les vérifications ont permis de recenser que le prévenu ne disposait pas encore d’un travail. « Cela fait beaucoup d’argent pour un jeune homme sans ressource », conclut la juge.

Après plusieurs jours d’enquête, les policiers finissent par remonter la filière du trafic jusqu’au fournisseur. L’examen du portable du conducteur révèle des messages suspects laissant supposer une participation à un trafic de drogue : « Va là-bas ! » « la cliente t’attend. », accompagné de photos ne laissant aucune place au doute. Dès lors, les enquêteurs décident d’initier une descente de police au domicile du trentenaire, à Argenteuil. L’intervention « musclée » qui se déroule, très tôt dans la matinée du 20 décembre, engendrera de bonnes surprises. Face au refus des parents du suspect d’ouvrir, les forces de l’ordre mettent une dizaine de minutes à enfoncer la porte d’entrée à l’aide d’un bélier.

Au même moment, l’une des fenêtres de ce logement s’ouvre et il en tombe subitement d’étranges paquets. Le mis en cause aurait tenté de jeter de la drogue par la fenêtre de l’appartement, mais les policiers étaient aussi présents en contrebas. Au total, la pesée des sachets a révélé un poids total d’un peu plus de 15 kilos de résine de cannabis dans des sachets avec le même sigle retrouvé sur les plaquettes : « Wanted Dead or Alive ».

Outre la grande quantité de stupéfiants, 20 euros en espèces, des feuilles de compte, de la résine de cannabis, un couteau, des sachets de congélation, des stickers.
« C’est le matériel de base pour un dealer », précise la juge. Au moment de son interpellation et des auditions, l’homme nie toutes les accusations malgré qu’il ait déjà eu affaire à la police pour différents délits, tels qu’ usage illicite, transport et détention non autorisé de stupéfiants.

Au cours de l’audience, la présidente a tenté de comprendre les relations entre les deux prévenus. Elle s’est d’abord heurtée au refus de coopérer, notamment de la part du plus âgé . « Je ne sais plus », « je ne me souviens plus très bien ». Finalement, les deux individus cèdent et expliquent « craindre les représailles ». Dans le box, derrière son masque, le plus âgé des prévenus reconnaît qu’il lui arrivait de vendre de la drogue, mais uniquement à mi-temps et pour une très faible rentabilité. « Ce n’est pas comme si c’était du plein temps. Je ne gagnais que 600-700 euros par mois ». Surprise par sa réponse, la présidente rappelle le coût et les conséquences de ses actes. « Vous êtes dans un monde à part. Vous ne vous rendez pas compte de la peine encourue ».

« Nous avons affaire à un dossier modèle, qui recèle tous les ingrédients du trafic de stupéfiants », précise le procureur de la République dans sa réquisition, indiquant également : « Tout ceci transpire les mensonges éhontés et les explications farfelues. Au regard des faits graves, vous n’aurez aucune difficulté à entrer en voie de condamnation ». Le procureur en a même profité pour féliciter les forces de l’ordre, l’enquête ayant été menée par la sûreté territoriale des Hauts-de-Seine.

L’avocat du second prévenu dénonce les réquisitions du procureur, les considérant trop
« exagérées », au vu des « procédures bricolées » et du « manque d’investigation de la part des forces de l’ordre ». Sa confrère, qui gère le plus jeune des prévenus sera plus modérée. Elle plaidera « pour une peine sévère sur de la résine de cannabis » de la part d’un « primo-délinquant, qui reconnaît les faits et qui s’est toujours soumis  »

Le tribunal optera pour une peine légèrement en-deçà des réquisitions du ministère public. Le « fournisseur » écopera d’une peine de 30 mois d’emprisonnement, avec maintien en détention. Le livreur, quant à lui, est condamné à 18 mois de prison avec sursis probatoire durant cinq ans, ainsi que la confiscation de tous les scellés, excepté les 500 euros de la mère du second prévenu.

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