Quand l’une sera livrée, l’autre sortira tout juste de terre. À l’horizon du mois de juin 2022, la Défense comptera officiellement une tour de bureaux supplémentaire, avec la finalisation du bâti de la tour Hekla, première tour dessinée par Jean Nouvel à voir le jour. La tour The Link quant à elle, autre symbole du renouveau immobilier du quartier d’affaires et futur siège de TotalEnergies, ne sera pas encore la plus haute de France.

Ses fondations devraient être achevées dans le courant du mois d’avril, avec l’étape clé du coulage du radier, socle de béton qui parachève le travail en sous-sol. « Après, nous aurons encore deux ans de gros-œuvre, durant lesquels il faudra mener à cheval la pose de la façade et le travail des corps d’état, décline Roland Cubin, directeur des opérations chez Groupama immobilier, propriétaire du site et à l’initiative du projet The Link. En tout, il reste à peu près trois ans et demi de travaux ».

En comptant l’aménagement et la décoration des plateaux, ce chantier monumental à un milliard d’euros prendra fin à l’horizon du deuxième semestre 2025. Peu de modifications ont été apportées au projet architectural depuis le dépôt du permis de construire : quelques adaptations concernant les jardins d’étage et le vitrage sont seulement à noter.
À l’inverse de la tour Hekla, qui aura perdu de sa conception à sa réalisation sa façade en « double peau », troquée pour une simple, grâce à un gros travail effectué sur les vitrages, aux caractéristiques évoluant selon leur orientation au sein de la tour.

La pose de la façade qui avance à grands pas. « Nous nous trouvons actuellement au niveau 29, précisera Cyril Tuquet, responsable du suivi des essais techniques de Bateg, filiale de Vinci Construction France, durant une visite presse récemment organisée sur le chantier vendredi 15 octobre. Concernant la construction du noyau, les compagnons sont  au niveau 43. En ce qui concerne la construction des plateaux, nous en sommes au niveau 39 ». Au 35e étage, encore dépourvu de façade, l’installation des tuyauteries, gaines électriques et autres travaux de corps d’état secondaires s’achèvent tout juste.

La tour est entrée dans une phase de réception de plateaux avec les architectes et les maîtres d’œuvre, à raison d’un niveau par semaine. L’objectif étant d’atteindre pour l’été 2022 le 48e et dernier niveau. Initialement prévu en février 2022, l’achèvement des travaux a par deux fois été ajourné en raison de la crise sanitaire, à mai puis à juin 2022. L’enjeu est donc de tenir le rythme, pour les 650 professionnels et la centaine d’entreprises sous-traitantes qui s’activent encore sur le site.

La maîtrise des cadences étant facilitée par le choix d’une réalisation en coffrages traditionnels, avec laquelle le personnel est plus habitué, plutôt qu’en coffrages auto-grimpants – méthode retenue pour l’édification de la tour Trinity par exemple. « L’important, c’est aussi l’aspect logistique, souligne Cyril Tuquet. Cela demande une préparation importante, une organisation millimétrée pour l’approvisionnement du matériel, avec le gros tonnage qu’il faut amener au pied de l’immeuble avant de l’acheminer dans les étages ». Un défi à relever alors que les emprises de chantier sont étriquées (voir notre édition du 6 novembre 2019).

Une problématique à laquelle est aussi confronté le chantier de The Link, qui a en plus dû répondre aux exigences de Paris la Défense, l’organisme public aménageur du quartier d’affaires, en matière de réduction de pollution visuelle sur le site. « Paris la Défense, qui veille à ce que la Défense ne donne pas l’image d’un quartier en perpétuel travaux, nous a demandé de voir si on ne pouvait pas réduire la taille des bases de vie et s’installer dans des bureaux vacants, détaille Roland Cubin. C’est ce qu’a fait le maître d’œuvre ADIM, en récupérant deux niveaux du Carré Michelet pour la base de vie et une partie des ouvriers ».

Une configuration qui prévoit la montée en puissance à venir du chantier, qui devrait compter 1 000 personnes à plein régime. Si la plupart des emprises de chantier sont déjà en place, la construction de la plateforme logistique, qui permettra de stocker les matériaux de construction (voir notre édition du 29 septembre 2021), n’interviendra elle qu’en fin d’année. Le calendrier devrait être respecté, nous assure-t-on. Un calendrier, qui n’a essuyé qu’un retard de six semaines à cause de l’épidémie de Covid.

« Ce qu’on a eu, comme difficultés, c’est qu’on a signé le 14 mars le contrat. Et le 17, nous étions confinés, se souvient Roland Cubin. C’est à ce moment-là que nous avons perdu du temps. Avec la mise à disposition retardée du domaine public. Depuis cette date, on tient les délais, même s’il y a eu quelques cadences à améliorer, en ajoutant un peu de monde à certains postes ». Le déroulé des opérations suit pour l’heure le programme initié. La paroi moulée, qui entoure l’excavation réalisée pour les fondations, est désormais achevée.

19 % des barrettes, éléments en béton armé enfoncés dans le sol à 60  mètres de profondeur pour supporter les dizaines de milliers de tonnes de l’édifice, ont été achevés pour le moment. Aucune mauvaise surprise n’a entaché le début des travaux. « On n’a eu aucune anomalie que nous n’ayons pas anticipé, assure Roland Cubin. Nous avions mené des sondages assez approfondis pendant la période de mise au point contractuelle et nous avions obtenu une cartographie assez précise de la zone. On a bien fait face à un terrain compliqué, avec des galeries, des vestiges de gares, des fondations d’ouvrage mais aucun obstacle que l’on n’attendait pas ».

Les travaux ne faisant que commencer, le béton reste le seul matériaux indispensable ou presque au chantier. La tour The Link échappe donc pour l’heure aux pénuries de matériau, conséquences de la rapide reprise des marchés américains et chinois, qu’a au contraire dû anticiper Vinci Construction pour la tour Hekla.

« Le marché est tendu, il est vrai, reconnaît Cyril Tuquet. Il y a des problématiques sur le BA 13 et concernant l’approvisionnement en bois. On est également touché par la crise des semi-conducteurs, comme le secteur automobile, puisque toute la petite machinerie que l’on peut installer est pilotée par des automates qui nécessitent de l’électronique ».

Vinci et ses sous-traitants ont donc passé commandes en avance auprès de leurs fournisseurs ou réservé directement en usines ou sur les plateformes logistiques ces matériaux, avant de se les faire livrer au fur et à mesure. L’augmentation des prix ne devrait donc avoir d’incidence sur le coût total de la tour, estimé entre 270 et 280 millions d’euros, hors aménagement des plateaux. Le coût n’est pas non plus un motif d’inquiétude du côté de Groupama Immobilier, qui finance en totalité le projet The Link sur ses fonds propres, en dépit des aléas pouvant affecter le chantier.

« On a signé un contrat de promotion immobilière (mandat d’intérêt par lequel maître d’ouvrage et promoteur s’engagent à la réalisation d’une construction sur la base de prix fixés contractuellement, Ndrl). Il n’y a pas de contrat plus sécurisant pour nous. On n’attend pas de modifications particulières, sinon concernant par exemple l’aménagement intérieur, qui doit encore être calé ». Mais pour le moment, l’heure n’est encore qu’à la désignation des électriciens, plombiers et autres artisans en charge des réseaux de tuyauterie et ventilation, bien loin devant celle des décorateurs.

CRÉDIT PHOTO : ILLUSTRATION / PCA STREAM

CRÉDITS PHOTOS : LA GAZETTE DE LA DÉFENSE