« On verra le grand Brice ». Ronan O’Gara, l’entraîneur du Stade Rochelais et ancien technicien du club des Hauts-de-Seine, avait prévenu avant le match : Brice Dulin ne passera pas à côté de sa demi-finale vendredi soir à Lille contre son ancienne équipe. Cette petite phrase était d’autant plus prophétique que l’arrière français fut le grand ­monsieur de la rencontre, remportée en toute logique 19 à 6.

La première demi-finale du Top 14 promettait d’être engagée. Face à une force collective sereine et revancharde depuis la défaite en finale de la Coupe d’Europe, les Racingmen connaissaient la recette gagnante : remporter le combat physique. Il n’en fut rien. Malgré une bonne entame, et les trois premiers points inscrits (3-0 puis 6-3 dans le premier quart d’heure), les hommes de Laurent Travers ont commencé à subir.

Brice Dulin lui, a géré tranquillement sa demi-finale. La science de son placement dans la couverture du terrain, a rendu fou le demi d’ouverture du Racing Finn Russell. ­Surtout, l’arrière rochelais a utilisé à bon escient son jeu au pied. D’abord avec un jeu au pied de pression quand son équipe était en difficulté. Puis pour apporter du danger offensif grâce à sa classique chandelle réceptionnée par lui-même. Enfin, en étant décisif, pour permettre à son ailier Arthur Retière de marquer le premier et unique essai du match à la 30ème minute (16-6).

« Ces deux jeux au pied dans notre dos nous ont acculés dans notre camp en première période, regrettait le demi de mêlée Maxime Machenaud. On ne peut pas couvrir tout le terrain. Ils savaient qu’on délaissait certaines zones par rapport à notre montée défensive. […] On n’a pas su répondre à ça ».

L’essai est symptomatique des difficultés franciliennes du soir. À la demi-heure de jeu, la Rochelle bénéficie d’une mêlée sur les 22 mètres adverses. Ballon en main, Brice Dulin adresse un petit ballon par dessus la défense que réceptionne parfaitement Arthur Retière. Après la transformation de West, dix points séparent les deux équipes (16-6). Le tournant du match.

Car si tous les espoirs étaient permis avant cette demi-finale, le club des Hauts-de-Seine possèdant sans doute la meilleure ligne de trois-quarts de l’Hexagone. Face à la meilleure défense du championnat, Russell, Fickou, Beale et consorts devaient apporter le grain de folie nécessaire à ce genre de rencontre. Le premier est passé à côté de son sujet, comme souvent dernièrement dans les grands rendez-vous. Les deux derniers ont bien tenté de dynamiser l’attaque. Sans succès.

« On a manqué un peu de précision, de stratégie sur les sorties de notre camp, on s’est exposé, expliquait Laurent Travers en conférence de presse. Au final sur le bilan de la saison, il y a de la déception. […] On n’est pas loin mais ça ne suffit pas pour notre club. On voulait encore plus ».

Il y eut bien cette possession dans les 22 mètres rochelais suite à une bonne mêlée du pack du Racing à dix minutes de la fin du match. La dernière chance du Racing s’est finalement retournée contre eux, à cause d’une énième précipitation et d’un ballon récupéré par les Rochelais. Si tout n’est pas à jeter comme l’a rappelé Laurent Travers, ce coup d’arrêt est une vraie désillusion. Jamais dans la rencontre, les Franciliens ont ­semblé en mesure de bousculer les événements.

La saison du Racing s’arrête donc aux portes de la finale. Éliminés en quarts de finale de la Coupe d’Europe, troisièmes avec autant de victoires que les deux premiers en phase régulière du championnat, les Franciliens sont à leur place. A nos confrères du Midi Olympique, le président Jacky Lorenzetti était colère : « Des choses vont devoir changer. Cette saison est un échec et on ne peut s’en satisfaire ». Si le manager Laurent Travers n’est pas menacé, l’effectif devrait être renouvelé.

Car avec « seulement » un titre de champion de France en dix ans, et malgré une qualification constante pour les phases finales du Top 14 et trois finales de Champions Cup, le Racing 92 déçoit. Rumine. « Peut-être me faut-il être plus dur et qu’ils aient moins le cul dans la graisse », disait encore le président du club.

En attendant de savoir qui soulèvera le Bouclier de Brennus vendredi prochain entre La Rochelle et ­Toulouse, le Racing va devoir se poser les bonnes questions. Pour revenir plus fort dès la saison prochaine qui débutera le 4 septembre.

CRÉDIT PHOTO : LA GAZETTE DE LA DÉFENSE