Depuis le début du mois de janvier, les avocats sont mobilisés dans les Hauts-de-Seine et partout en France contre la réforme des retraites. Mardi dernier, 11 février, la poursuite de la grève a été votée par le conseil de l’ordre et les avocats du barreau, toujours aussi motivés pour défendre leur régime autonome de retraite.

Après de nombreuses actions notamment le blocage du tribunal de Nanterre il y a quelques semaines (voir notre édition du 15 janvier 2020) , la mobilisation reste forte, les initiatives se multipliant. Un mouvement contre la réforme, dans un climat tendu pour les avocats qui peinent à dialoguer avec le gouvernement, mais surtout qui veulent sensibiliser l’opinion publique et les justiciables.

« La poursuite de la grève dure a été votée par le conseil de l’ordre mardi et ça a été ensuite discuté en Assemblée générale […] On a un barreau qui est toujours très volontaire pour maintenir l’opposition ferme à la réforme en l’état » explique vendredi 14 février Maître Vincent Maurel, bâtonnier des Hauts-de-Seine de la grève débutée le 6 janvier.

Ce jour-là, les avocats participaient à la journée « Justice mon amour ». Le bâtonnier explique de cette initiative, « l’idée étant de faire comprendre aux magistrats et aux membres du personnel du greffe que notre combat, bien sûr les gêne très certainement dans leur travail, mais que c’est vraiment pas eux notre cible ».

Dans le courant de la semaine, le barreau pourrait organiser une nouvelle « journée de défense massive » durant laquelle, plusieurs avocats sont proposés aux justiciables en comparution immédiate. « L’idée est d’offrir […] non pas un, mais quatre, cinq, six, sept avocats. ça prolonge le temps de la procédure » indique le bâtonnier.

Avec la poursuite de la grève, Vincent Maurel aborde également les actions quotidiennes, « on est resté sur des modalités très dures avec effectivement, on invite tous les confrères à demander les renvois et il faut maintenir la suspension de toutes désignations ».

Pour le bâtonnier, cette grève qui dure depuis plus de six semaines est l’occasion de sensibiliser sur le contexte général qui peut mettre en difficulté les avocats. « On est conscient des difficultés que notre mouvement peut causer, mais c’est aussi l’occasion peut être de dénoncer le manque de moyens. Enfin, la justice est maltraitée dans ce pays, c’est le parent pauvre » réagit Vincent Maurel.

« Le mouvement va aggraver les stocks, mais les stocks sont déjà très importants, il y a des retards considérables, les délais complètement anormaux en fonction des juridictions, il y a un vrai problème dans ce pays […] en ce qui concerne la justice, donc notre mouvement, ça peut nous permettre d’alerter l’opinion publique sur ça » poursuit-il.

Des conséquences de la grève longue durée pour les avocats, le bâtonnier précise : « les greffiers, les magistrats souffrent de la durée des audiences, des demandes de renvoi et l’accumulation des stocks, les justiciables souffrent de ne pas avoir d’avocats, mais les avocats souffrent de ne plus avoir de revenus donc c’est bien la démonstration qu’il y a un problème ».

Le barreau et le conseil national des avocats, ont dont mis en place un fonds de solidarité, et réfléchissent à des solutions pour aider les avocats qui souffriraient le plus financièrement. « Je suis impressionné par la motivation des confrères qui souhaitent la poursuite de ce mouvement alors que financièrement, ils en souffrent » souligne Vincent Maurel.

Depuis lundi 17 février, le projet de loi est étudié par l’Assemblée nationale. Le bôtonnier compte sur le soutien des parlementaires après avoir été déçu des dernières discussions avec le gouvernement et plus particulièrement par la lettre du samedi 8 février de la ministre de la Justice, Nicole Belloubet.

« On se disait, est-ce que maintenant que les parlementaires commencent, on va sur quelque chose d’un peu plus souple avec une forme de maintien d’une grève avec des actions une fois de temps en temps, etc. Mais [..] les réponses qui nous ont été faites d’abord par le gouvernement ensuite la lettre de Madame Belloubet samedi, ça a énervé tout le monde » réagit le bâtonnier.

« On ne nous propose rien de nouveau et il n’y a rien de crédible en fait. Et, il y a tous les à côté qui sont dévastateurs » note-t-il. « On est les seuls à gérer notre régime de base solidaire, et on y tient. C’était vraiment la raison pour laquelle on s’est levé au début » rappelle Vincent Maurel de leur motivation et de la mobilisation.

PHOTO : ILLUSTRATION / LA GAZETTE DE LA DEFENSE