Semaine compliquée à Paris X alors que de très nombreux partiels étaient prévus du 6 au 10 janvier. Des étudiants de l’université, réputée pour être particulièrement politisée, ont provoqué des blocages en série tout au long de la semaine, pour protester contre la réforme des retraites mais aussi leurs conditions d’étude.

En pleine grève des transports, des dizaines d’étudiants sont ainsi venus à l’université de Nanterre pour apprendre que leur partiel ne pouvait pas se dérouler, à cause des blocages des amphithéâtres par quelques militants de l’Unef (Union nationale des étudiants de France), ou encore du NPA. Un bras de fer s’est même enclenché entre la présidence et les grévistes sur le report des examens, chaque partie ne voulant rien céder à l’autre.

Dès dimanche 5 janvier, le président de l’établissement, Jean-François Balaudé, annonçait la mise en place d’un hébergement au sein de la faculté, pour permettre aux étudiants habitant loin de dormir sur place. « Pour répondre avec les moyens de l’université aux besoins de solidarité, j’ai décidé d’ouvrir le gymnase à compter de lundi soir », expliquait-il en ajoutant que des navettes entre la Défense et l’université seraient mises en place.

Mais la mesure a très rapidement été vivement critiquée par les militants de gauche de l’établissement. D’ailleurs, elle a donné lieu à de fausses informations : sur les réseaux sociaux, des militants pro-blocages affirmaient que la nuitée était payante, ce qui était faux. Bien que ce dispositif ait été annoncé avant la semaine de partiels, personne n’a voulu profiter des 50 places mises à disposition par l’université.

Toute la semaine, les militants de gauche favorables aux blocages n’ont cessé de demander un report pur et simple des examens. « Il y a plein de solutions, un report des examens, des devoirs maison ou même en ligne », assure un militant du NPA mardi 7 janvier au matin à des étudiants non grévistes, parfois peu convaincus.

« On ne peut pas reporter les examens de la première session, on est vraiment coincés », explique quant à lui le président de l’université, lors d’un point presse le même jour. « L’année scolaire serait rallongée, personne n’a envie de ça et c’est toute une organisation », poursuit Jean-François Balaudé. « Moi, des examens en juillet je ne peux pas, confie d’ailleurs un jeune étudiant en 3ème année de Lettres. J’ai un job d’été. »

Concernant les devoirs maison ou en ligne, Jean-François Balaudé est formel : cela ne peut pas se faire non plus. « On l’a fait en 2018, se souvient le président. Ça a été décrié, tout le monde dit « plus jamais ça », « diplôme en chocolat ». On l’a entendu ».

Résultat : chaque examen bloqué par les grévistes apporte un 0 aux étudiants ne pouvant pas le passer. « C’est parce qu’on est obligés de mettre une note pour les bulletins, tente de rassurer le président. Tous les étudiants pourront passer leur examen en session 2 (aux rattrapages, Ndlr) et les boursiers ne seront pas pénalisés. » Une situation très mal vécue par les étudiants, grévistes ou non. « Au lieu d’avoir deux chances pour passer un examen, ce sera un one shot », soupire Clément, militant au NPA.

« Je trouve qu’on est quand même assez souples », estime le président de la fac, alors que les différents professeurs étaient invités à ne pas prévoir de partiel le jeudi 9 décembre, jour de la mobilisation nationale. Une heure de retard est acceptée pour tous les étudiants en examen, au cas où ils seraient bloqués dans les transports.

Chaque matin dès 7 h, une petite poignée de militants disposent poubelles et barrières pour bloquer l’accès à certains bâtiments, le tout dans le calme et face à des étudiants venus passer leurs partiels, un peu décontenancés. Mais la mobilisation étudiante s’est rapidement étiolée au cours de la semaine. Alors que mardi 7 janvier seulement « 50 % voire un tiers » des partiels avaient pu se dérouler sans encombre, aucun examen n’a pu être bloqué vendredi 10 janvier.

Lundi 13 janvier (jour où sont écrites ces lignes, Ndlr.), « tous les bâtiments sont accessibles et les examens se tiennent », assurait l’université sur Twitter. Autre exemple d’une mobilisation sur le déclin : l’assemblée générale des étudiants grévistes de vendredi 10 janvier. « Nous ne sommes que 54, constate une militante du NPA lors d’une prise de parole. On était plus de 100 en début de semaine. » Pourtant, le petit groupe semble motivé à poursuivre la mobilisation.

Dans ce bras de fer où la communication entre administration et militants semble rompue, la présidence a tout de même dit comprendre certaines revendications des étudiants, sans pour autant approuver leurs méthodes. Ces méthodes ont d’ailleurs poussé l’administration à faire appel aux forces de l’ordre lors d’un précédent mouvement étudiant, en avril 2018*. Une décision difficile à prendre, confie le président de l’université : « On sait que ça amène des violences physiques ».

« C’est vrai que la situation est très dure, a concédé le président de l’université à propos des inquiétudes des étudiants. Il y a des évolutions qui peuvent faire peur. C’est vrai qu’il y a des inquiétudes sur l’avenir, et ça je peux le comprendre. Mais ça ne passe pas par la conclusion qu’il faut bloquer son université ».

Compréhensif sur certaines inquiétudes des étudiants, Jean-François Balaudé, qui va d’ailleurs très prochainement quitter la présidence de la faculté, s’est montré bien plus ferme sur les autres causes chères aux étudiants les plus engagés. « Je n’ai jamais entendu aucune proposition de ceux qui veulent bloquer, a-t-il ainsi lâché. Ils sont contre, ils sont contre, ils sont contre. Ils peuvent fort intelligemment faire des propositions, faire des tribunes ou s’exprimer dans la rue. »

Alors qu’une nouvelle semaine de partiels est déjà entamée à Paris X, l’administration ne semble pas vouloir reculer ou plier face aux menaces des pro-blocages. Ceux-ci se mobilisent d’ailleurs toujours cette semaine, malgré un essoufflement flagrant de leur mouvement accompagné d’ailleurs d’un rétablissement progressif des transports en commun.

*Erratum: A l’origine, il était indiqué que les forces de l’ordre avaient été dépêchées à l’université le mardi 7 janvier, afin de mettre fin aux blocages. Cette information était erronée. Jean-François Balaudé, président de l’établissement, évoquait en fait une intervention policière du 9 avril 2018, lors d’un autre mouvement étudiant. La police n’a pas été appelée pour mettre fin aux blocages de janvier 2020. La Gazette présente ses excuses aux personnes concernées et à ses lecteurs.