Mardi 15 janvier, une trentaine d’adhérents LREM sont réunis pour leur réunion mensuelle dans une salle municipale, cette fois-ci autour d’une galette des rois… mais surtout pour échanger autour du « grand débat » souhaité par le président de la République, et justement mis en place ce mardi-là. Au programme de la réunion courbevoisienne : des conseils pour une base inquiète du fossé grandissant entre le mouvement des gilets jaunes et le leur.

« Le débat est destiné aux gilets jaunes, mais cela ne fonctionnera pas, parce qu’ils considèrent que ce qui vient d’en haut, c’est de l’enfumage ! » En une phrase, l’adhérent Jean-Pierre Gross, professeur d’anglais au lycée public de Courbevoie, a réussi à résumer le dilemme auquel se retrouve confronté le parti de la majorité gouvernementale, à Courbevoie comme partout en France.

Ce grand débat, qui aura lieu du 15 janvier au 15 mars, mais dont les contours de l’organisation pratique des réunions publiques restaient encore flous aux yeux des responsables de l’antenne locale, comprend quatre axes : transition écologique, fiscalité et dépenses publiques, démocratie et citoyenneté, ainsi que l’organisation de l’Etat et des services publics. Les « marcheurs » courbevoisiens comptent proposer deux ateliers citoyens, les 6 et 21 février prochains.

Lors de la réunion militante, il est fait remarqué que la plupart des maires des Hauts-de-Seine se montrent réticents à la demande de l’État. A Courbevoie, l’ouverture des cahiers de doléances, qui fleurissent un peu partout en France, est intervenue la semaine dernière, mais les maires altoséquanais sont réticents à organiser des réunions publiques (voir encadré).

« Il faut faire attention, parce qu’il y aura forcément des gens qui viendront miner le déroulement du débat », s’inquiète un adhérent. « Le mieux, c’est d’identifier ceux qui viennent avec un discours pré-conçu des autres partis politiques et les interpeller en tant que citoyens », conseille-t-il. « J’ai demandé à la trentaine de personnes de mon groupe de bridge si elles voulaient venir ce soir, mais personne n’a répondu », s’inquiète Michel Richard. Ce retraité voudrait que des « conseils pour réussir à intéresser ses proches » lui soient donnés.

Lisa, 20 ans et autant d’années à Courbevoie, fait partie des « jeunes avec Macron » depuis quelques mois. « Je ne voulais pas me politiser, mais ce qui m’a convaincue, c’est que je peux donner mon avis personnel sans devoir réciter l’avis officiel du parti, assure-t-elle de l’ouverture au débat du jeune parti. C’est là-dessus qu’il faut insister pour convaincre les gens ! ».

Pour l’un des adhérents présents, il faut investir plus avant les réseaux sociaux : « Ils charrient peut-être de la boue, mais c’est le meilleur moyen d’éviter le hors-sol, et de battre en brèche les critiques que l’on fait à la république en marche ». Pour Jean-Pierre Gross, professeur au lycée Paul Lapie de Courbevoie, la rupture est cependant profonde. « Je n’abandonnerai jamais, parce que c’est dans ma nature, sourit-il. Mais je donne un cours dans une classe médias-langue et je parle souvent de conspirationnisme, et je constate une défiance très forte dès l’école. »

Alors, l’enseignant s’interroge quant à la probabilité que ce « grand débat » réconcilie certains Français avec leurs institutions. « Pour rétablir un lien de confiance entre ceux qui se considèrent comme venant d’en bas et ceux qui représentent l’autorité, l’exécutif, ça va être très compliqué, s’inquiète-t-il. Honnêtement, à part avec la baguette magique d’Harry Potter, je ne vois pas comment on peut faire. »

En parallèle de ce « grand débat », deux ateliers citoyens seront proposés au café Niagara, les 6 et 21 février à 20 h. Ce mardi soir, les adhérents sont invités à participer au tractage pour y attirer du monde. Le premier se concentrera sur la démocratie et la citoyenneté, le second sur la fiscalité et les dépenses publiques.

« On n’a pas l’ambition de suppléer le débat national, mais on cherche à créer une émulation, à vivifier le débat, détaille Cédric Flavien, animateur local de LREM à Courbevoie. Par effet de ricochet, on espère qu’il n’y aura pas que des gens du parti. C’est aussi la raison pour laquelle on organise ces débats dans un café. »

Ils ne savent pas s’ils vont « attirer les foules », mais ces ateliers demeureraient un « bon moyen de faire remonter les idées ». Sonia, habitante de Courbevoie et mère de deux enfants, observe silencieusement les échanges. Elle qui aimerait « s’impliquer au niveau local » envisage un potentiel engagement dans le parti : « C’est la première fois que je viens, mais je vais encore devoir réfléchir… »

Autour de la Défense, des cahiers de doléances mais pas de débat public

Ces derniers jours, chacune des quatre municipalités entourant le quartier d’affaires ont annoncé la mise en place de cahiers de doléances dans le cadre du « grand débat national » lancé le 15 janvier par le gouvernement. Mais les édiles LR des Hauts-de-Seine n’ont pas l’intention d’aller jusqu’à organiser des débats publics.

A Puteaux et à La Garenne-Colombes, un seul cahier de doléances est disponible, à l’accueil de chacune des mairies. A Courbevoie, ils ont été installés jusqu’au 15 mars à l’hôtel de ville, ainsi que dans les mairies de quartier et à la bibliothèque des Damiers. A Nanterre, des registres sont accessibles dans une douzaine de structures municipales, ainsi qu’en version dématérialisée sur le site internet de la mairie.

Mais à ce jour, aucune des quatre mairies n’a manifesté l’intention d’organiser de débat public, les trois maires LR ayant même pris une décision commune avec leurs homologues de l’ensemble du département dans le cadre du comité départemental du parti. « On ne peut pas nous demander d’éteindre l’incendie allumé par Emmanuel Macron, a ainsi récemment déclaré au Parisien Philippe Juvin, l’édile de La Garenne-Colombes et président de la fédération LR des Hauts-de-Seine. Ce d’autant plus après avoir passé 18 mois à mépriser les élus locaux ! »

PHOTO : LA GAZETTE DE LA DEFENSE