L’organisation est millimétrée. La construction de la tour Hekla, haute de 220 m, nécessite une attention toute particulière pour ses maîtres d’œuvre. Si elle sera l’une des plus hautes tours de la Défense, elle est aussi construite sur un espace très réduit. Le chantier est ainsi coincé entre deux bretelles du boulevard circulaire, le chantier de la tour Pascal actuellement en rénovation, et la mise en place du jardin suspendu de la Rose de Cherbourg, voulu par Paris La Défense, organisme public gestionnaire du quartier.

En plus des nombreuses mesures et d’une attention toute particulière portée sur les lignes ferroviaires souterraines qui passent à quelques mètres du socle de la tour, l’organisation de stockage et la planification du chantier sont aussi scrutées de près. Au mois d’octobre, une centaine de personnes travaillaient sur ce chantier. Leur nombre augmentera très significativement en 2020 lors de la sortie de terre de la tour Hekla.

S’il n’y a pas de réseau « sous le chantier à proprement parler », explique Pierre Figiel, directeur gestion de contrats chez Bateg, filiale de Vinci, certains passent à côté. Ainsi, des réseaux d’anciennes canalisations, de communication et d’électricité « ont été dévoyés et mis à l’extérieur de l’emprise du chantier ». Ces réseaux permettront à l’avenir « d’alimenter la tour », explique-t-il.

« Il y a un réseau souterrain qui est important : c’est le T2 et la ligne L », poursuit Pierre Figiel. Ce double tunnel longe la partie enfouie de la tour pour rejoindre la gare la Défense – Grande arche et sort de terre quelques centaines de mètres plus loin, vers Puteaux. « Ça a été un enjeu technique majeur », confie le directeur de gestion de contrats.

En effet, les parois souterraines qui doivent soutenir la future tour et qui descendent à 30 m de profondeur ont été mises en place avec une précision millimétrée pour qu’aucune incidence ne soit faite sur les tunnels RATP et SNCF. « On a bardé les tunnels de cibles, pour mesurer les déplacements des sols, explique Pierre Figiel. Derrière il y a la sécurité des voyageurs, donc les seuils de tolérance de déplacements sont très élevés. »

Les tunnels ne doivent pas être déplacés de plus de un centimètre tous les cinq mètres. « Ce n’est vraiment rien », indique Vincent Virlogeux, directeur de projets pour le promoteur AG real estate. Aussi, et point important pour les futurs habitués de la tour Hekla, la possibilité de vibrations dues aux passages de trains a été jugée « négligeable » par les différents acteurs du chantier. « Les éventuelles vibrations passent quand même à travers deux ou trois mètres de béton, ça amortit », explique Pierre Figiel.

Mais le chantier de la tour Hekla n’est pas particulier qu’au niveau des réseaux souterrains qui l’entourent. La zone est très dense : le boulevard circulaire entoure le futur gratte-ciel, et divers travaux sont en cours à proximité directe. « On a une somme de contraintes qui est terrible, et on a un objet de 150 000 tonnes qui doit venir s’implanter, résume Vincent Virlogeux. C’est un objet qui s’insère dans un contexte extrêmement fin mais en même temps qui ne doit pas gêner les voisins. »

Effectivement, le trou béant du chantier est un enchevêtrement de zones de stockage étriquées. Seules deux grues peuvent être installées pour construire la tour, « sinon elles se gênent », explique Pierre Figiel : « Le travail de logistique est assez pointu. » Les zones de stockage à l’extérieur du chantier vont être utilisées tour à tour pour permettre à Paris La Défense d’effectuer les travaux du jardin suspendu de l’échangeur routier de la Rose de Cherbourg.

« On fait un travail d’ordonnancement des tâches très fin, jour par jour. La logistique est définie heure par heure ou demi-heure par demi-heure. […] C’est un sujet éminemment important », assure Pierre Figiel. Ainsi, les temps d’acheminement différents selon les aires de stockages, qui ne seront pas au même endroit tout au long des travaux, doivent être pris en compte.

« Pour faire 80 000 m², on a une emprise de chantier très faible de 1 900 m², illustre Vincent Virlogeux. C’est extrêmement réduit, ça veut dire que sur l’emprise elle-même, il n’y a absolument aucun endroit où on ne stocke pas ». Malgré ces contraintes quotidiennes, le chantier de la tour imaginée par Jean Nouvel ne connaît aucun retard. Si le gratte-ciel n’est qu’un trou béant d’une trentaine de mètres entre deux voies du boulevard circulaire, il devrait sortir de terre au début 2020. La tour sera livrée deux ans plus tard.