Jugé aux assises malgré un diagnostic de schizophrénie, il est finalement déclaré irresponsable

Yehya B. a été jugé, suite à quatre expertises, « irresponsable de ses actes ». Pourtant il a comparu du 20 au  22 avril 2022, aux assises de Nanterre pour tentative de meurtre. Une première dans l’histoire de la Justice française, rappelait son avocate Me Daphné Pugliesi au journal Le Parisien. « C’est la première fois dans les annales judiciaires que je vois une personne dont quatre experts ont établi l’irresponsabilité pénale renvoyée devant une cour d’assises ».

Que s’est-il passé ce 26 janvier 2019, jour où Yehya B. a tenté d’assassiner un jeune homme prénommé Yassine. La victime est décrite par l’accusé comme « ce mec qui a volé l’amour de ma vie ». Sauf que voilà, la jeune femme dont le prévenu est amoureux sortait déjà avec Yassine quand Yehya la croise, en 2016, sur le campus de la faculté d’Alger. Ils n’ont jamais eu de rapprochements, pourtant le jeune homme n’a aucun doute : « elle voulait être avec moi mais elle hésitait entre deux mecs et du coup, elle a choisi celui qui est plus audacieux, plus entreprenant. » Un rejet insurmontable pour ce jeune homme perturbé, pourtant ancien élève d’une école d’ingénieur algérienne et bénéficiaire d’une bourse d’excellence. C’est cette bourse qui lui avait donné la possibilité de venir terminer ses études en France.

Sauf que, trois ans de dépression et une tentative de meurtre avec préméditation plus tard… Yehya B. est jugé par plusieurs experts comme souffrant de « schizophrénie paranoïde ». Un diagnostic qui aurait dû éviter à l’homme de 28 ans un jugement, et l’envoyer directement en hôpital psychiatrique. Mais la chambre de l’instruction en a décidé autrement, en mai 2021. Selon elle, le comportement de Yehya révélait « un ancrage dans le réel peu compatible avec une abolition totale du discernement », rappelle le média What’s up doc. Pour l’avocate de la défense, la chambre d’instruction a été influencée par le timing de cette affaire.

En effet, les expertises psychiatriques de Yehya B. ont été rendues juste après le verdict de l’affaire Sarah Halimi, la sexagénaire juive tuée en 2017 et dont le meurtrier a été jugé non responsable suite à une trop grande consommation de cannabis. Était-il ou non irresponsable ? Yehya assure qu’il avait des dispositions dans sa famille, « j’ai un oncle schizophrène» . Mais l’acte paraît longuement réfléchi. Il a acheté ses armes sur internet,
« une pour lui, une pour moi », explique-t-il à la présidente des assises. C’est avec une de ces armes, un pistolet à plomb, qu’il a tiré sur son « rival », à Colombes, le 26 janvier 2019.

L’homme a survécu, Yehya ne s’est pas suicidé… Mais surtout, il n’ira finalement pas en prison. La cour a rendu son verdict vendredi dernier et a reconnu le jeune homme irresponsable de ses actes. La veille du verdict, devant la cour d’assises, un énième expert affirmait : « Il ne fait aucun doute que son libre arbitre, au moment des faits, était complètement effondré ».

Un avis partagé par l’avocate du prévenu, qui rappelle que son client a tenté : « de tuer un rival qui n’en n’est pas un, dans le cadre d’une relation amoureuse qui n’existe pas ». L’avocat général, bien que d’accord avec les experts et les juges, avait pourtant requis un minimum de quinze ans de prison. De la réclusion, il n’y en aura pas, mais Yehya B. a été hospitalisé d’office dans un centre psychiatrique. « Un verdict empreint du bon sens » selon Me Pugliesi.

CREDIT PHOTO : LA GAZETTE DE LA DEFENSE

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