Victime d’une agression, une transsexuelle ne reçoit presque aucune aide de ses voisins

Une transsexuelle de 32 ans agressée par son compagnon dans son appartement de Puteaux n’a reçu presque aucune aide de ses voisins. L’un d’entre eux a tout de même appelé le 17.

Une transsexuelle et son compagnon étaient dans le box des accusés mercredi 18 septembre au Tribunal de grande instance (TGI) de Nanterre. Deux jours plus tôt, ils avaient été arrêtés après une très violente dispute à l’appartement de la trentenaire à Puteaux. Blessée par un couteau de cuisine, elle avait appelé ses voisins à l’aide mais ils n’étaient pas intervenus, même s’ils ont avoué avoir entendu ses plaintes.

La jeune femme sous traitement hormonal, et encore officiellement homme, présentait une plaie importante sous le pied gauche. Celle-ci a nécessité 15 points de suture. Elle souffrait aussi d’autres blessures moins graves. Son compagnon, d’origine algérienne, a lui aussi été blessé lors de la violente dispute, ses plaies n’ont cependant nécessité que deux points de suture. Ils ont été condamnés à 12 mois de prison avec sursis en plus de dommages et intérêts et d’une interdiction de se contacter.

« Des voisins ont refusé de l’aider parce qu’il était transsexuel, c’est scandaleux », a lancé l’avocate de la plaignante à la cour. Âgée de 32 ans et née au Pérou, la jeune femme est prostituée au bois de Boulogne depuis de nombreuses années, malgré des diplômes d’assistante gériatrique et de coiffeuse obtenus dans son pays natal. Son compagnon, âgé de 21 ans, a fait sa connaissance il y a quelques semaines sur le réseau social Facebook. Ils se fréquentent depuis trois semaines.

Tout a commencé vers 8 h du matin lundi 16 septembre, dans l’appartement de la jeune femme situé au premier étage d’un immeuble du boulevard Richard Wallace, à Puteaux. Le couple rentre quelque peu éméché d’une soirée à Pigalle. Rapidement, le ton monte entre les deux et une violente crise de jalousie éclate. La trentenaire s’empare d’un couteau de cuisine, puis les détails de la dispute deviennent flous : les deux protagonistes changent de version au cours de l’enquête, comme à l’audience.

« Il y a du sang partout », détaille la présidente de séance en feuilletant les 78 photos prises sur les lieux de la dispute et dans l’immeuble. L’appartement est dans « un bazar innommable », poursuit-elle. Deux sex-toys ensanglantés, le couteau de cuisine et une couette sont finalement embarqués par les policiers, prévenus par une voisine.

En partant à l’école ce lundi-là, ses enfants ont découvert des traces de sang dans les parties communes de l’immeuble. Cette voisine a elle-même croisé la jeune transsexuelle blessée quelques minutes après. Malgré les demandes d’aide, elle ne l’a pas recueillie, mais est rentrée chez elle et a prévenu la police.

En garde à vue, le couple s’est réconcilié. « Les policiers disent que vous avez parlé toute la nuit par cellule interposée », note la magistrate. « On a fait l’erreur de notre vie », explique le jeune homme, qui est en situation irrégulière en France. Les deux expliquent qu’ils veulent maintenant aller de l’avant. « Je vais m’occuper d’elle », poursuit le prévenu en regardant sa compagne qui peine à se déplacer à cause de sa blessure au pied. « Nous allons nous marier pour régulariser ma situation », affirme-t-il.

Des propos qui ne convainquent pas la procureure. « Ils vont se marier ? Ça fait trois semaines qu’ils sont ensemble et ils viennent de s’entretuer », s’exclame-t-elle en ajoutant : « On ne saura véritablement jamais ce qu’il s’est passé. » Malgré les dires des prévenus et leur réconciliation, ils se portent tous les deux partie civile et demandent à l’autre des dommages et intérêts.

Lui n’a aucun casier judiciaire et vit en France depuis l’enfance. Né en Algérie au sein d’une famille avec une bonne situation, il s’enfuit lors de vacances en France et sera ensuite, selon ses dires, hébergé en famille d’accueil. « Mon père voulait une fille », se souvient-il : « J’étais jeune je ne comprenais pas encore trop ces choses-là, mais ça je le sentais. » Il est aujourd’hui cuisinier « au black ». Sa compagne par contre a un antécédent : en 2017, elle a été condamnée pour des violences avec arme.

« C’était quand j’étais en couple avec un forain, détaille-t-elle, mais les circonstances n’ont rien à voir avec cette affaire. » La présidente de séance s’arrête pourtant sur ce point : « Vous avez l’amour un peu vache ! » D’origine péruvienne, elle vit en France depuis 7 ans. Lorsque la magistrate lui demande pourquoi elle est prostituée alors qu’elle a des diplômes, elle répond : « J’étais sans papiers, je ne pouvais pas faire mon métier. »

Cette « relation toxique » qu’ils voulaient tous les deux poursuivre va devoir prendre fin : le tribunal les condamne chacun à 12 mois de prison avec sursis assortis d’une interdiction d’entrer en contact l’un avec l’autre. Elle devra lui verser 500 euros de dommages, et lui est condamné à lui verser 1 000 euros.

RAPPEL
Les condamnations en première instance ne sont pas définitives puisque susceptibles d’appel. Jusqu’à leur condamnation définitive, les prévenus sont donc toujours présumés innocents.

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