« Nous avons un véritable problème de recrutement, avec des candidats munis de peu de compétences techniques », déplore Idalina Neves, responsable formation et projets pour la chaîne de centres de réparation et d’entretien automobile Speedy. Une situation également constatée par l’Association nationale pour la formation automobile (ANFA), laquelle a récemment comptabilisé à 10 000 le nombre de postes non-pourvus dans le secteur.

Alors que ce dernier est en croissance régulière, et devrait, selon l’ANFA créer 50 000 emplois d’ici cinq ans, Speedy a internalisé sa formation depuis 1996 afin de remédier à ce manque d’effectifs. À l’aide d’un centre de formation de 3 000 m² situé le long de l’autoroute A86 à Nanterre, le groupe investit massivement dans la formation de ses salariés et de mécaniciens en devenir.

« Cela représente un million d’euros par an pour financer la structure, mais aussi les frais de déplacement des collaborateurs, le stock, les outils et la flotte de véhicules de formation », estime Idalina Neves. La responsable, son assistante et les quatre formateurs qui composent le centre forment chaque année 3 500 personnes à l’aide de 35 000 h distribués à tous les salariés, des centres de réparation en passant par le siège.

Selon l’ Association nationale pour la formation automobile (ANFA), 50 000 postes devraient être créés dans le secteur d’ici cinq ans.

La pénurie est telle et la réponse au problème si compliquée que le groupe a décidé de créer une formation professionnelle intégrée. « On a obtenu une habilitation de l’Association nationale pour la formation automobile (ANFA) pour pouvoir former en contrat professionnel une dizaine de jeunes par an, explique la formatrice. Cela se fait sur une année complète civile afin de les former sur la période estivale, laquelle est la plus active pour nous et de nous rendre compte de leur assiduité. »

À la clé, un diplôme ainsi qu’un CDI si « la motivation est là. » Ce système, en place depuis 10 ans, aurait « permis à l’entreprise de conserver 80 % de jeunes formés » et intégrés à l’entreprise. Le 9 octobre dernier, les apprentis démontaient dans une salle en binôme les pneus d’une voiture, élevée sur pont, et travaillaient sur les freins. « Tout repose sur la pratique et pas que la théorie », décrit la responsable.

Autre levier actionné par l’entreprise, la formation continue de ses salariés. « Un collaborateur est envoyé en formation, en moyenne une fois tous les deux ans », totalise Idalina Neves. Et pour ce faire, le centre investit lourdement pour que la formation se fasse concrètement. « Nous disposons de trois bancs moteurs dynamiques, deux bancs moteurs statiques (des moteurs nus, sans le reste de la voiture, Ndlr) », énumère-t-elle.

Lors de la visite du centre, organisée en trois salles de pratiques, des salariés Speedy travaillaient également en binôme sur des cas pratiques précis en lien avec le bloc moteur. Sous les yeux de leur formateur, deux d’entre eux s’appliquent à effectuer un diagnostic sur l’un des bancs moteurs statiques du centre. « Il faut bien procéder par étapes, insiste le professeur du jour à ses élèves. C’est peut être du métal mais le moteur est très fragile. »

Pour muscler le tout, la direction du centre admet à demi-mots que la fidélisation passe aussi par une revalorisation salariale pour les salariés effectuant les formations et obtenant les certifications.

« Une dizaine de voitures-écoles est renouvelée régulièrement en fonction des voitures traitées par l’ensemble des centres Speedy du groupe dans l’année », conclut-elle. Par ailleurs, le centre a aussi développé un système de formations numériques « en place depuis une quinzaine d’années », se souvient Idalina Neves. « Cela se fait sous forme de modules, créés en interne, allant de 10 à 30 min, qui permettent d’effectuer un complément de formation ».

Celle-ci est validée à la fin par un questionnaire. « Au tout début, c’était un Powerpoint amélioré, décrit la formatrice. Désormais c’est beaucoup plus interactif avec des simulations de manipulations ». Pour muscler le tout, la direction du centre admet à demi-mots que la fidélisation passe aussi par une revalorisation salariale pour les salariés effectuant les formations et obtenant les certifications.

« Le vrai souci, c’est que la mécanique est dévalorisée en permanence, s’agace-t-elle. Regardez la dernière pub de la Caisse d’épargne ! (celle-ci met en scène les discours décourageants à l’encontre d’un lycéen souhaitant faire de la mécanique, Ndlr). » Le système de formation rencontrerait un tel succès qu’il provoquerait également le départ de nombreux salariés vers la concurrence. « Beaucoup de collaborateurs Speedy ont été débauchés par les concurrents », déplore-t-elle.