Alors que le mercure descend dangereusement, salariés et entreprises du quartier d’affaires investissent les chaudes salles de loisirs d’intérieurs. Lors d’une pause déjeuner ou en soirée, escape game et laser game s’adaptent au rythme des travailleurs et leur offrent l’occasion de s’amuser, de coopérer, et parfois de se découvrir dans des activités ludiques. Les entreprises de la Défense y trouvent de leur côté un bon moyen d’y renforcer les liens entre leurs salariés.

Au sein de l’escape game Teambreak du centre commercial du Cnit, où l’on s’enferme pour s’échapper, en moins de 60 min chrono, de ses impératifs de travail, mais aussi dans les salles obscures du laser game de la Garennes-Colombes, où l’on peut « légalement tirer sur son chef », vieux et moins vieux se redécouvrent une âme d’enfant.

Il est 14 h pile, ce vendredi de janvier, lorsque les portes des salles de l’escape game Teambreak, situé à l’étage inférieur du Cnit, s’ouvrent, laissant sortir deux groupes hilares, déguisés en prisonniers et en sorcières. Les salles, qui accueillent 4 à 12 aventuriers, coûtent 110 euros pour une heure.

Du côté des prisonniers, sept salariés de l’agence de gestion de voyage Egencia. « C’est la deuxième fois que l’on vient, et on n’a toujours pas réussi, mais on reviendra ! » s’exclame la joyeuse troupe. À leur décharge, le thème « prisonnier » est le plus difficile qu’offre Teambreak, avec un taux de réussite de seulement 10 %. « C’est un bon moyen de resserrer les liens entre collègues, d’autant plus que l’on ne travaille pas forcément toujours ensemble, commente Kevin, salarié d’Egencia. On a rigolé mais on a surtout travaillé ensemble, en coopération. »

Gaëtano, responsable artistique de Teambreak, fait un dernier briefing avant que les comédiens ne s’occupent des salariés d’Engie.

Alors que les deux équipes quittent les lieux, les salariés de Teambreak s’affairent dans une arrière-salle. La spécificité de l’entreprise d’escape game, l’une des pionnières du secteur en France, ce sont les comédiens qui accompagnent les groupes de visiteurs. Alors que 130 salariés de l’énergéticien Engie s’apprêtent à envahir les lieux, Gaëtano, le responsable artistique qui s’occupe du recrutement des comédiens, termine les derniers préparatifs avec son équipe déguisée en militaires.

« Aujourd’hui, on va s’occuper de plus de 100 personnes, tonne-t-il de sa grosse voix. On doit faire en sorte qu’ils trouvent trois éléments qui leur permettent d’infiltrer une réunion de militaires, dans laquelle ils devront prendre des informations pour localiser le QG de Pedro, un sombre dictateur qui veut détruire le monde ! »

« J’ai recruté les comédiens et on les a fait répéter, on cherche des gens déjantés pour que les clients aient une expérience plus immersive, renseigne-t-il de cette démarche particulièrement théâtrale. Idéalement je recrute des comédiens qui ont un humour qui se balade entre les Nuls et les Monthy Pythons. »

Dans la salle d’attente, Lucie Lafourcade, responsable du développement des ressources humaines d’Engie, scrute la foule d’un œil alerte. C’est elle qui a choisi Teambreak pour organiser une séance de « teambuilding » afin que les nouveaux stagiaires en alternance puissent s’intégrer dans l’entreprise. « On veut de la cohésion entre les nouveaux alternants et leurs tuteurs, explique-t-elle. Nous avons des conditions précises : on a une équipe jeune et on avait besoin d’un endroit qui puisse accueillir autant de monde. »

Cédric Tétard, le créateur de Garenne game, dans le cabinet du professeur Gary Gones.

Colonel Ryo, le responsable du Teambreak de la Défense, confirme que le centre, qui peut accueillir jusqu’à 5 000 personnes par mois, séduit de nombreuses entreprises. «  La Société générale, l’Oréal, M6, la SNCF, la plupart des grandes entreprises de la Défense passent chez nous, détaille-t-il. On a plus d’un tiers de notre chiffre d’affaire qui vient des corpos. »

Moins de logique et plus de cardio, le Laser world de la Garenne-Colombes, situé à quelques dizaines de mètres de l’arrêt de T2 Charlebourg, au 11 avenue de Verdun, offre un terrain de jeu de 600 m² pour se défouler. À l’intérieur d’un parcours interactif, qui regorge de passages piégés et autres mines, les joueurs armés d’un matériel dernier cri (les fusils envoient des bombes et peuvent prendre la forme d’un bouclier, Ndlr) s’affrontent seuls ou en équipes pour des parties de 20 min coûtant 10 euros par personne.

Se présentant comme le « plus beau laser game des Hauts-de-Seine », l’entreprise compte sur une clientèle composée d’enfants qui fêtent leur anniversaire, d’enterrements de vie de jeunes filles et de groupes d’amis. En moins de trois mois d’existence, le laser game compte d’ailleurs déjà une demande en mariage : « Heureusement qu’elle a dit oui », souffle avec humour Sami Ghalleb, le responsable de la salle.

« Mais on compte surtout démarcher les sociétés présentes dans le quartier d’affaires », explique-t-il. Plusieurs entreprises de la dalle, comme Groupon ou encore Thales, sont d’ailleurs déjà venues dans l’espace de 600 m ². « En général, on organise ça le jeudi soir, c’est le mieux pour nos clients, détaille le responsable. On leur propose également un service de traiteur. » Et la formule semble plaire, là encore pour des activités dédiées au « teambuilding » cher à ces grandes sociétés. « C’est une activité où le temps d’une partie, on oublie la hiérarchie : on peut tirer sur son boss légalement ! », sourit Sami Ghalleb.

À Puteaux, un escape game réservé aux enfants

Depuis début décembre, Escape game aventure a ouvert ses portes à Puteaux.. pour les 5 à 10 ans ! Située au 2 rue Bernard Palissy, la jeune entreprise vise une clientèle plus jeune, accompagnée des parents. Au travers d’une chasse au trésor qui conduira les aventuriers à retrouver le médaillon précieux dans un voyage dans le temps, les groupes d’aventuriers sont accompagnés de deux comédiens, qui endosseront tour à tour les rôles de scientifiques, de Jacques Soulow ou encore du terrible Barberousse.

Les deux hommes, amis de lycée qui ne se sont pas quittés depuis, travaillent pour la chaîne télévisée dédiée aux enfants Gulli. Respectivement réalisateur et auteur pour l’émission Gu’live, ils ont passé trois mois à travailler sur le scénario et à l’adapter aux attentes d’un public juvénile : «  On a remarqué que les enfants ne cherchent plus au bout de 30 min, ils faut les faire jouer. Ils ont besoin d’émotions fortes et de mouvements. »

Plongés dans le noir, dans la cale du sombre Barberousse, les enfants doivent mettent au point des stratégies pour l’assommer afin de lui subtiliser son trousseau de clefs. Au terme d’une séance agitée, même les parents se révèlent ravis. Pour Florian et Audrey, qui ont accompagné leurs enfants dans l’aventure (la présence d’un parent est obligatoire, Ndlr), la mise en scène et les comédiens font la différence : « Ils ne manquent pas d’humour et sont à fond dans leur rôle. Ça faisait un moment que l’on cherchait un escape game que l’on puisse faire tous ensemble et on n’est pas déçu ! »

Mathis et Margault, respectivement 4 et 7 ans, déguisés par des costumes prêtés par l’escape game, sortent doucement de leur rôle. S’ils ont eu « un peu peur du squelette caché », ils ont beaucoup aimé l’aventure : « C’était super, même si on a eu du mal à retrouver le médaillon ! ». Les séances se réservent en ligne, au tarif de 110 euros pour 5 personnes, et 20 euros par personne supplémentaire.

À la Garennes-Colombes, un escape game sur le thème d’Indiana Jones

Face au poids lourd Teambreak, situé au Cnit et dans 11 autres endroits en France, de plus petits escape game, créés par des passionnés, fleurissent dans les Hauts-de-Seine. A la Garennes-Colombes, Cédric Tétard vient d’ouvrir chez lui, au 41 avenue Foch, une salle sur le thème d’Indiana Jones.

« Ici, on entre dans le cabinet du professeur Gary Gones », présente-t-il en dévoilant son escape game, qu’il définit comme « une aventure immersive grandeur nature, où à travers la réflexion, la manipulation et la cohésion d’équipe, on doit se sortir d’une situation inconnue en moins d’une heure ». Tout un programme.

« On essaie vraiment d’en révéler le moins possible. Lors du briefing, on n’explique pas comment ça se passe : on bande les yeux des gens et on les amènent dans la salle où ils doivent se débrouiller tout seuls, raconte ce passionné d’escape game. Bon, je les suis grâce aux caméras, et je les aide s’ils sont vraiment bloqués. On a environ 40 % de réussite, si on ne les drive pas, le taux tombe à 10 %. »

« Le scénario est non linéaire : il y a une partie fouille, une partie réflexion et de la manipulation », ajoute-t-il, précisant qu’il touche surtout un public familial : « J’aime entendre les parents me dire que les enfants se sont amusés sans toucher à la tablette. » La salle de 35 m², qui accueille de trois à six personnes, se réserve au prix de 120 euros en heures pleine, et 100 euros en heure creuse (avant 18 h hors période scolaire et week-ends, Ndlr).

PHOTOS : LA GAZETTE DE LA DEFENSE